La Tour de Babel
On sait que Noé quitta la scène trois cent cinquante ans après l’épisode de l’arche, alors qu’il atteignait ses neuf cent cinquante ans. Comme quoi, l’alcool conserve, même s’il vous a poussé à maudire votre petit-fils – totalement innocent – en lui souhaitant de devenir « l’esclave des esclaves de ses frères » (Ancien testament, livre de la Genèse, chapitre 9).
Après ça, la Bible détaille en un chapitre entier tout à fait indigeste la descendance du poivrot, puis passe au chapitre 11 où il est question du curieux épisode de la Tour de Babel. Il y est précisé que « Toute la Terre avait une seule langue et les mêmes mots » (verset 1), mais qu’une partie des descendants de Noé, conduits par le chasseur Nimrod, son arrière-petit-fils, « trouvèrent une plaine au pays de Schinear », en Mésopotamie, mais nul ne sait où exactement. L’endroit s’appelle Babel, et Nimrod va y régner, mais tous se mirent à fabriquer des briques et du bitume pour les lier, afin de construire une ville et une tour (verset 4).
Là-dessus, « L’Éternel descendit pour voir la ville et la tour », et décida de leur en jouer un, de tour : « Confondons leur langage, afin qu’ils n’entendent plus la langue les uns des autres » (verset 7). Pour quel motif ? Pas de motif. Dieu venait de créer le « bon plaisir » qui sera si cher à nos rois.
La conséquence : « L’Éternel les dispersa loin de là sur la face de toute la Terre ; et ils cessèrent de bâtir la ville » (verset 8). Jalousie de créateur ?
L’épisode n’eut aucune suite digne d’être rapportée. Un simple caprice. Non seulement Dieu est bon et ne sème pas la pagaille parmi ses créatures, mais il a de l’humour : bien avant Antonioni, il avait inventé l’incommunicabilité. Et, bien avant les éditions du dictionnaire Robert, le charabia.