Les promesses de la monarchie marocaine
En 1975, le général Franco, chef d’État en Espagne, était à l’agonie. Le roi du Maroc, Hassan II, en profita pour relancer ses revendications sur le Sahara Occidental, une colonie de l’Espagne, profitant de ce que les Nations-Unies avaient demandé, le 20 décembre 1966, un référendum sur cette question (résolution 2229 de l’Assemblée générale), et que l’Espagne avait annoncé, le 20 août 1974, qu’elle organiserait un référendum d’autodétermination dans les six premiers mois de 1975. Mais Hassan II rejetait cette idée, car il pouvait fort bien perdre cette consultation, et il exigeait une « restitution » pure et simple. En fait, son seul désir était de mettre la main sur les très riches mines de phosphates de la région, le Maroc étant déjà le premier exportateur mondial de cette ressource naturelle.
Or il n’avait aucun allié, et son voisin, l’Algérie, était même hostile à cette restitution (cela dure encore), position qui avait entraîné une guerre entre les deux pays en 1962, juste après l’indépendance de l’Algérie ; laquelle Algérie se mit alors à soutenir les anti-indépendantistes du Sahara Occidental, qui créèrent en 1973 un mouvement indépendantiste, le Front Polisario.
Grand amateur de poker, Hassan II voulut bluffer, et, le 17 septembre 1974, annonça qu’il soumettrait le cas à la Cour de Justice Internationale qui siégeait à La Haye. L’Espagne accepta de reporter son projet de référendum jusqu’au verdict de la Cour. Les Nations-Unies demandèrent à la Cour de se prononcer sur les questions suivantes : le Sahara Occidental, lorsqu’il fut colonisé par l’Espagne, était-il terra nullius (territoire n’appartenant à personne) ? Et sinon, quels étaient les liens entre ce territoire, d’une part, et le Maroc et la Mauritanie d’autre part ? Autrement dit, appartenait-il au Maroc ou à la Mauritanie ?
Après une enquête internationale sur le terrain puis en audience, durant vingt-deux sessions en juin et juillet 1975, et une ultime inspection sur place, la Cour rendit son verdict le 16 octobre : par treize voix contre trois, elle conclut que le territoire n’était pas terra nullius à l’époque de la colonisation, donc qu’il appartenait à quelqu’un ; par quatorze voix contre deux, qu’il y avait eu des liens d’allégeance du Sahara envers le Maroc ; et par quinze voix contre une, qu’il y en avait aussi avec « l’entité mauritanienne » (la Mauritanie en tant que telle n’existait pas encore).
Pourtant, la Cour, définissant ces liens d’allégeance, déclarait qu’ils n’entraînaient ni souveraineté, ni possession du territoire convoité.
Hassan II fit mine de triompher, puisqu’on reconnaissait des liens d’allégeance entre son pays et le Sahara, et décida de récupérer par la force le territoire qu’il convoitait. Ce qu’il fit en lançant sur le Sahara une armée de trois cent cinquante mille chômeurs fanatisés, contre laquelle l’Espagne ne se défendit pas, Franco étant à l’article de la mort.
Ce coup de force ne reçut l’approbation d’aucun pays, et Hassan II, sous la pression internationale, se résigna ultérieurement à proposer un référendum d’autodétermination, qu’il n’organisa jamais. Il est mort en 1999, et les Sahraouis attendent encore !
C’est pourquoi son fils, Mohammed VI, qui vient de promettre à son « cher peuple » des élections législatives dans un délai très court, laisse sceptiques ceux qui connaissent les procédés de la monarchie alaouite.