Les questions futées
Lorsque David Pujadas, depuis son desk (c’est comme ça qu’on parle, dans la profession) du Journal télévisé de France 2 – où il risque sa peau chaque jour –, a interrogé à distance un gréviste sur les lieux de son travail, et qu’à ce triste individu très énervé, il a posé la question : « Est-ce que vous lancez un appel à la modération ? », il a reçu en retour, et en forme de baffe, la réponse qu’il méritait et que nous avons tous entendue dans les différents zappings : « Je lance rien du tout ! ».
Pujadas est donc tombé sur un os : un interlocuteur plus intelligent que lui, et qui ne se laisse pas piéger par ce type de questions qu’adorent les mauvais journalistes, celles qui contiennent la réponse que l’interviewé DOIT donner s’il joue le jeu. En somme, le gréviste n’a pas joué le jeu. Salaud de pauvre, comme disait Gabin dans La traversée de Paris.
Je crois savoir que cette manière de questionner les gens est une spécialité française, et qu’à l’étranger, notamment à la BBC, on s’abstient de ce procédé grossier. Une ou deux fois ici, j’avais promis de faire l’exégèse des interviews que Laurent Weil, sur Canal Plus, fait avec les artistes de cinéma. Lorsque j’aurai pris le temps d’en décortiquer une, vous constaterez qu’elles ne sont pas piquées des hannetons, et que demander par exemple à Angelina Jolie, au bas des marches du palais des festivals, si elle est « contente d’être à Cannes », c’est d’un redoutable amateurisme qui justifierait que l’imbécile soit flanqué à la porte sur l’heure.
(À mon avis, on le garde pour la seule raison qu’il parle l’anglais)