Qui sont les singes ?
Je déteste absolument l’extrême droite, je tiens Le Pen pour un facho (on peut le dire sans risque, la justice l’a débouté quand il a porté plainte contre un journal qui l’avait qualifié ainsi), et j’estime que le Premier ministre et SOS Racisme ont bien fait de saisir le procureur de la République afin de faire juger et condamner le journal « Minute », qui titre ce matin que « Maligne comme un singe, Taubira retrouve la banane ». Dans le même numéro, les journalistes Christine Clerc et Tugdual Denis sont qualifiés d’« enfoirés » en couverture.
Ce n’est pas une question de personnalité. J’espère que « Minute » récoltera ce qu’il a semé. Madame Taubira ne manque pas de qualités, elle est opiniâtre et courageuse, et elle a réussi à faire passer une loi que tout le monde n’approuvait pas. Néanmoins, cela n’implique pas que je la porte dans mon cœur. Pour moi, elle restera toujours celle qui, avec Jean-Pierre Chevènement, s’est portée candidate à l’élection présidentielle en 2002, sous une étiquette de gauche, sachant bien que ce tandem détournerait des voix qui ont effectivement manqué à Lionel Jospin, l’ont fait passer en troisième position, derrière Chirac et Le Pen, et l’ont éliminé. Ce qui nous a valu la réélection de Chirac pour cinq ans, puis l’élection de Sarkozy, qui n’aurait jamais eu lieu si Chirac ne lui avait pas servi de marche-pied involontaire. Bref, dix années désastreuses, et des dommages irréparables. Or cette catastrophe était à ce point prévisible qu’à l’époque, sur un forum que j’avais créé, j’avais averti mes amis, tous de gauche, qu’ils devraient bien se garder de voter selon leur cœur, comme on le dit souvent, et pour de petits candidats, autre expression consacrée, car je voyais venir le coup. Je reste irrévocablement partisan de voter utile, pour un candidat de son bord ayant toutes les chances d’arriver premier ou deuxième au premier tour. Tout ce qui peut ressembler à un vote du type « ras-le-bol » est contre-productif, donc stupide.
C’est même ce qui me sépare de Didier Porte, qui penchait pour Mélenchon lors de la dernière campagne, l’année dernière, et ne s’est pas privé de le faire savoir. Il aimait tellement ce tribun populiste qu’il lui a fait enregistrer un texte pour l’inclure sous forme de dialogue dans son avant-dernier spectacle ! Porte doit être un grand sentimental. Pas moi.