Sport national : violer impunément la loi
On se croirait encore sous De Gaulle et Pompidou, avec ces policiers qui ont arrêté, traîné au commissariat et abominablement battu ce malheureux garçon de quinze ans qui n’avait rien fait de plus que de fumer un joint, et ne leur avait même pas résisté lors de son interpellation. Bilan très glorieux pour la police : des contusions partout, des marques de strangulation, et... un bras cassé. Pour tout arranger, des collègues de ces tortionnaires ont confirmé ce festival gore.
Aujourd’hui, on peut se demander comment le ministre de l’Intérieur, à l’instar de tous ses prédécesseurs, va s’y prendre pour les faire échapper au procès qui, normalement, si nous vivions en république, attendrait ces nostalgiques de la Gestapo. Il va nous sortir le couplet habituel sur les malheureux policiers qui sont la cible des pavés et autres cocktails Molotov, lancés par les casseurs pendant les manifestations ?
Pour ma part, ce que je jugerais tout à fait normal, c’est qu’on leur inflige le double de la peine prévue : amende et prison. Non, je n’écris pas cela sous le coup de la colère, et admettez que ce n’est pas mon genre, mais au nom de ce simple principe, qu’on doit être beaucoup plus sévère envers quiconque est chargé de faire la loi, ou de la faire respecter, et qui la viole. C’est-à-dire que, par exemple, un ministre du budget qui frauderait le fisc devrait se voir appliquer une peine deux fois plus lourde que celle qu’on infligerait à un citoyen ordinaire ; qu’un candidat à la présidence de la République qui aurait fait payer aux citoyens sa campagne électorale devrait voir ses biens confisqués jusqu’à remboursement complet de ce qu’il a volé à la collectivité, plus une somme équivalente à verser au Trésor public ; que le bras droit d’un ministre de l’Intérieur qui, durant deux ans, aurait empoché des primes en liquide qu’un précédent gouvernement avait rendues illicites, devrait être obligé de tout rembourser jusqu’au double de ce qu’il a détourné ; qu’un parlementaire qui enfreindrait une loi votée par le Parlement auquel il appartient devrait perdre définitivement la totalité de ses droits civiques ; et que, bien entendu, un policier qui se croirait assez au-dessus de la loi pour se conduire comme un repris de justice devrait goûter pour longtemps à la paille humide des cachots, et être obligé d’indemniser personnellement sa victime.
Rien à voir avec la loi du talion : il s’agit de sanctionner plus sévèrement ceux qui se retranchent derrière leur insigne, leur uniforme ou leur titre pour commettre impunément des délits (faites ce que je dis, pas ce que je fais). Vous et moi n’avons pas cette possibilité et ne souhaitons pas l’avoir.
(Et j’ajoute que les juges qui se sont assis sur les droits de la défense pour condamner un innocent devraient aussi tâter de la cellule. Le jour où les Français auront récupéré leur bon sens et ressembleront un peu aux Scandinaves, cette remarque semblera évidente à tous)