Un voleur mort reste-t-il un voleur ?

Publié le par Yves-André Samère

Après les flots de larmes ayant suivi la mort accidentelle de Christophe de Margerie, devenu quasiment le Christ recrucifié, il n’y a pas eu beaucoup de réactions contraires. À ma connaissance, seul Gérard Filoche, ancien dirigeant de la Ligue Communiste Révolutionnaire mais membre depuis 1994 du Parti Socialiste, a réagi comme un homme qui ne suit pas les consignes venues d’en haut, ce qui est tout à son honneur, et comme un socialiste, ce qui est original dans ce parti et a fait taxer ses propos d’« inqualifiables » et « intolérables » par les instances du P.S., en la personne de Cambadélis. Valls et ses compères appellent donc à l’exclure du parti. Pourquoi pas réouvrir les goulags ?

Mais c’est que le crime de Filoche est épouvantable ! N’a-t-il pas écrit cette horreur, digne de faire frémir tout Premier ministre qui « aime les entreprises » ? Lisez plutôt : « Quand un patron gagne 300 à 600 smic, ou 21 millions d’euros de “retraite chapeau” comme Gérard Mestrallet, oui, c’est un voleur et un suceur de sang et de sueur ! Car ce n’est en aucun cas son travail qui lui apporte cette somme, c’est le vol du fruit du travail des autres. Nul ne gagne pareille somme par son mérite ! ». Le pape devrait bien excommunier ce Filoche, et le P.S. est appelé à le faire, c’est-à-dire à l’exclure, comme dit plus haut.

Au cas où vous reviendriez d’une longue croisière dans le Pacifique, permettez-moi de vous rappeler quelques hauts faits et quelques pratiques douteuses de la firme Total que pédégeait Margerie, et qui lui ont valu quelques procès. Je ne fais pas de propagande, je cite les faits :

- marée noire après le naufrage de l’Érika, et condamnation de Total à payer de fortes indemnités en 2010 ;

- accusation des familles des victimes d’avoir tout fait pour camoufler la vérité après l’explosion, en 2001, de l’usine AZF à Toulouse ;

- versements occultes de sommes importantes dans l’affaire « pétrole contre nourriture » en Irak, entre 1996 et 2003 ;

- coopération avec la junte dictatoriale au pouvoir en Birmanie jusqu’en 2011 ;

- condamnation pour avoir fait travailler des personnes sans les payer lors de la construction d’un gazoduc.

Et je vais me permettre, car cela ne figure apparemment nulle part, de dissiper quelques doutes sur les idées politiques de Margerie. Qu’il soit devenu le grand favori de la fausse gauche actuellement au pouvoir tend à faire oublier que c’était un homme de droite, et pas de la plus modérée. Il a participé à un déjeuner avec la rédaction du journal « Valeurs actuelles », le seul qui défend Zemmour et qui est un peu plus à droite que « Le Figaro » ; et, à l’issue de ce déjeuner, voici ce qu’il a écrit sur le livre d’or de l’hebdomadaire (je respecte la syntaxe et la ponctuation) : « Valeurs, Actuelles deux mots qui résonnent dans ma tête à tous moments. Merci de nous avoir soutenu dans des moments difficiles (je sais on ne dit jamais MERCI à des journalistes...), Merci de votre liberté d’expression et d’opinion, Merci de cet accueil, Merci de me donner la parole. A toute ! »

(NB : on rappellera que le Parti Socialiste n’a pas exclu Jean-Noël Guérini, pas plus que Jérôme Cahuzac, ni Thomas Thévenoud, l’homme qui a inventé la phobie administrative pour ne jamais rien payer, ni Jean-Marie Le Guen, le « Grand socialiste de l’immobilier » – l’expression est de Didier Porte –, ni Dominique Strauss-Kahn.

Il est vrai que l’heure est venue d’en finir avec « la gauche passéiste », comme l’a dit Manuel Valls au « Nouvel Observateur » il y a quatre jours ! Commençons donc par sacrifier un goujon. Pour les gros poissons, nous aviserons plus tard.

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