François Maspero
Avant-hier, François Maspero est mort, à l’âge de 83 ans. C’était un éditeur, mais il ne l’avait pas toujours été. En réalité, il était autrefois libraire, et avait deux librairies, face à face, à Paris, rue de la Huchette. Comme il était notoirement très à gauche, toute la droite le haïssait, et il était devenu à la mode d’aller dans ses boutiques pour le voler !
Les plaintes auprès de la police gaulliste ne servaient à rien, elle ne se donnait seulement pas la peine d’enquêter. Inévitablement, l’effet recherché par les petites frappes qui venaient piller son fonds de commerce a fini par se produire : la faillite, et Maspero a dû fermer boutique. L’une de ses librairies est devenue quelque temps une agence Nouvelles Frontières, et celle d’en face... une pizzeria.
Du reste, le Quartier Latin, qui était autrefois une ruche où bourdonnait la jeunesse étudiante, n’est plus aujourd’hui qu’une usine à bouffe (fast-foods, kebabs, et les inévitables pizzerias) et un alignement de magasins de chaussures. C’est cela, désormais, le Boulevard Saint-Michel : un magasin de fringues, un fast-food, un magasin de fringues, un fast-food... Des dix-sept cinémas qui se pressaient dans le quadrilatère Boul’Mich, rue de la Huchette, rue Saint-Séverin et rue Saint-Jacques, il ne reste que les deux petites salles du cinéma Saint-Michel (oui, celui où les sbires de Lustiger, cardinal-archevêque de Paris et académicien sans avoir écrit le moindre livre, avaient mis le feu pour le crime d’avoir programmé La dernière tentation du Christ, le film – raté – de Scorsese, et ces crétins ont d’ailleurs incendié celle des deux salles... qui passait un autre film !).