Privatisations en Nouvelle-Zélande

Publié le par Yves-André Samère

J’ai donné hier mon avis sur les privatisations opérées au Royaume-Uni par Margaret Thatcher. C’était déjà gratiné, mais le pire exemple des dégâts causés par les privatisations est certainement illustré par ce qui s’est passé en Nouvelle-Zélande.

Vers la fin des années 1990, le gouvernement décida de privatiser toute l’économie du pays : le système de santé, la compagnie nationale aérienne, la banque néozélandaise, les lignes de bus, la compagnie de télécom, les chemins de fer, l’industrie maritime, la branche acier, les forêts (incluant les scieries et les pépinières). Hormis le cas des forêts, où le bilan fut mitigé, dans tous les autres, les spéculateurs, les actionnaires et les inévitables traders ont bénéficié de ces ventes au privé.

En trois ans, les sociétés étrangères gagnèrent six milliards d’euros, mais investirent en retour moins d’un dixième de cette somme. Les chemins de fer avaient été remis en état par le gouvernement avant leur vente à un groupe états-unien. Pour maximiser les profits, l’entretien du réseau avait été sacrifié, des lignes furent supprimées, des petites gares fermées et les trains de nuit parfois aussi – comme on le fait en France actuellement. Il va sans dire que, comme toujours, ce sont les campagnes qui en ont pâti : il fallait désormais presque douze heures de trajet pour parcourir les 680 kilomètres séparant Oakland de Wellington.

Mais la véritable catastrophe survint en février 1998, lorsque toute la ville d’Oakland fut plongée dans le noir durant... six semaines. La faute en revenait à Mercury Energy, la compagnie nationale d’électricité : son entrée en bourse s’était faite, d’abord, aux dépens des employés : centre de formation fermé, la moitié des employés finalement licenciés, ces mesures mirifiques avaient permis un rendement de 21 %. Oui, mais, peu à peu, l’entreprise cessa d’entretenir le réseau, finissant par provoquer la panne. On imagine les conséquences d’une panne d’électricité d’un mois et demi ! Pénible pour les particuliers, mais catastrophique pour les entreprises et l’industrie.

Comprenant qu’il avait exagéré, le gouvernement décida de faire marche arrière, et renationalisa des entreprises qui avaient été privatisées. Pour revenir en arrière, le gouvernement recréa de toutes pièces une banque néozélandaise : la Kiwibank. La compagnie aérienne fut renationalisée, et le gouvernement dut racheter le réseau ferré pour en assurer lui-même l’entretien comme autrefois.

Mais ce rachat ne put effacer les quinze années de gestion privée sans investissement. Ainsi, encore aujourd’hui, le train est incroyablement inefficace. L’aciérie, rachetée par l’entreprise canadienne Karter Old Arvy, a finalement été fermée. Depuis la vente du pays au privé, les gens ont été obligés de cumuler les petits emplois pour survivre, le chômage a grimpé en flèche, et les inégalités, jusqu’alors très raisonnables, ont explosé.

Le pire de cette histoire est que ces chaos n’ont même pas permis de rendre le pays plus attrayant : au contraire de ce qui se passe en Angleterre, les étrangers ne vont pas s’y installer.

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