Perdre ses Klee
Un étranger, on le sait, ne peut être qu’anglais – pour les gens de médias, en tout cas, puisqu’ils ne connaissent que cette langue (ou plutôt croient la connaître), et surtout pas l’allemand, l’italien, l’espagnol, le russe, ou... l’arabe, quelle horreur ! Par conséquent, un nom inconnu ne peut se prononcer qu’à la manière anglaise, et un « pétère » allemand devient sans coup férir un « piteur ». Tendez l’oreille, et marrez-vous sous cape.
Ainsi, ce matin, la gourde préposée sur France Inter au bulletin d’information de sept heures et demie, Bernadette Chamonaz, découvre un peintre totalement inconnu (d’elle), un certain Paul Klee, dont nul n’a jamais entendu parler, si l’on excepte les dizaines de millions d’amateurs d’art qui savent que Klee est l’un des deux fondateurs de la « modernité classique », avec Wassily Kandinsky. Klee, Klee, voyons, mais comment prononce-t-on ce nom ? Ça ressemble bien à de l’anglais, avec ce double E comme dans Beethoven. DONC ce doit être « cli », la bonne prononciation ! Va pour cli.
Et les centaines de milliers d’auditeurs de France Inter qui savent, eux, que Klee était allemand et que son nom se dit « clé », entendent, consternés, le résultat.
C’est tout pour aujourd’hui. Demain, je vous parlerai de Pablo Paï-Casso, ainsi que de Salvador Dalaï, qui doit être tibétain, si je suis bien renseigné.