Grande librairie, petits écrivains (pas tous)
Le commentaire d’un lecteur m’a incité à télécharger l’émission de France 3 diffusée hier soir, La grande librairie. Et je suis partagé.
Le présentateur, d’abord, François Busnel. Il est loin d’égaler Bernard Pivot, modèle de simplicité, de bonhommie et de modestie ! Busnel se donne énormément de mal pour montrer combien il est cultivé, intelligent, et tout et tout. Résultat, il montre surtout qu’il est affecté, et cela ne pardonne pas, à la télévision. Passons.
J’estime que l’émission était mal conçue. Au contraire de la très regrettée Apostrophes, où l’on avait six invités qui se trouvaient présents dès le début sur le plateau et participaient à une conversation générale et souvent très animée, ici, ils arrivent les uns après les autres : Éric-Emmanuel Schmitt, puis Salman Rushdie, puis un enregistrement entre Rushdie et Paul Auster fait à New York, puis une jeune Marocaine qui n’avait rien à dire, puis un psy maboul, et enfin un astrophysicien d’origine vietnamienne qu’on aurait aimé entendre plus longuement, mais, arrivé le dernier, on ne lui a guère laissé de temps pour s’exprimer.
Évidemment, Rushdie dominait tout le monde, mais je ne veux pas insister, et comme je suis un esprit futile, je vais me concentrer sur un détail : à un certain moment, il a été question d’un roman de Tolstoï, Anna Karénine, dont la première phrase, traduite en français, est celle-ci : « Les familles heureuses se ressemblent toutes ; les familles malheureuses sont malheureuses chacune à leur façon ». Tilt ! Faute de français ! En effet, chacune est un singulier, leur sous-entend un pluriel. On doit donc écrire « Chacune à SA façon ».
Ce genre de traduction boiteuse est l’indice de la faiblesse des traducteurs actuels et de la disparition des correcteurs dans les maisons d’édition. Évidemment, cela ne frappe personne, puisque nul ne parle plus le français dans ce beau pays. Reste Pivot. Lisez le recueil de ses dictées, il y a tout.