Urgent : mettre les classiques au goût du jour

Publié le par Yves-André Samère

Vous avez peut-être remarqué combien j’apprécie le charabia politico-médiatique, surtout quand il se teinte d’expressions en faveur chez les shampouineuses et les caissières de chez Carrefour. C’est pourquoi j’ai décidé de me livrer à quelques recherches, en vue de déterminer l’époque exacte à laquelle sont nées certaines de ces expressisons.

Mon premier choix a porté sur le célébrissime « C’est pas évident », quand on lui attribue le sens de « C’est difficile ». Cette équivalence a dû être forgée par un linguiste aussi fortiche qu’Alain Rey, attendu que, pour cet éminent commerçant baratineur, évident ne signifie pas ce qui se voit facilement,  mais ce qui est facile à faire. Un peu, si vous voulez, comme cette métamorphose assez récente qui a fait que le mot compliqué remplace aujourd’hui TOUS les synonymes de : acariâtre, épineux, bizarre, chimérique, difficile, dur, extravagant, fantastique, fou, idéal, illusoire, imaginaire, immatériel, impensable, impraticable, inabordable, inaccessible, inadmissible, inapplicable, incompatible, inconcevable, inconciliable, incroyable, indu, inexécutable, inexcusable, inextricable, infaisable, inimaginable, inouï, insensé, insociable, insoluble, insoutenable, insupportable, insurmontable, intenable, intolérable, intraitable, invivable, invraisemblable, irréalisable, irréel, irrecevable, malcommode, odieux, revêche, ridicule, rocambolesque, utopique.

Ouf !

(Et merci au site http://www.synonymo.fr, sans lequel trouver tout ça m’aurait pris au moins un bon quart d’heure. Et je comprends que les perroquets qui exercent leurs talents dans les radio-télés ou dans les ministères aient reculé devant cette épreuve consistant à se creuser un peu la cervelle afin de varier leur vocabulaire)

Mais, voulant en avoir le cœur net, je me suis plongé dans les œuvres complètes de quelques scribouillards comme Molière, Marivaux, Racine, Beaumarchais, Rabelais, Victor Hugo, Rimbaud et son amant Verlaine, sans oublier Proust et Montherlant. Eh bien, le croiriez-vous ?, chez aucun de ces fumistes je n’ai trouvé la moindre occurrence de « C’est pas évident » mis pour « C’est difficile ». Il va falloir, comme dans 1984, réécrire tous les livres que ces ringards ont mis sur le marché.

Écrire ci-dessous une ânerie quelconque :

J
Le "c'est pas évident" ne qualifie pas la chose concernée dans le langage d'aujourd'hui, mais l'état d'esprit de celui qui doit s'en occuper. (la solution n'est pas claire pour lui) <br /> Et si vous ne trouvez pas cette expression chez les auteurs que vous citez, c'est parce qu'elle n'était pas encore à la mode. Mais en cherchant, je suis certain qu'ils ont emprunté des expressions en vogue à l'époque qui devaient faire grincer les dents aux puristes.
Répondre
Y
Ce n’est pas ce que je comprends. D’ailleurs, les hurluberlu(e)s qui s’expriment ainsi ne vont pas chercher si loin. De toute évidence, ils ne savent pas ce qu’ils disent.<br /> <br /> Quant aux expressions qui ont pu servir de remplacement, si elles avaient existé, elles m‘auraient sauté aux yeux. En réalité, c’étaient les “puristes” qui déraillaient (“Voiturez-nous ici les commodités de la conversation”).