Mes vacances
Depuis ce matin et jusqu’au 18 novembre, je suis en vacances. Très original, penserez-vous, mais un peu tardif. Mais non, je ne « pars » pas en vacances, comme on dit. En réalité, je ne pars jamais, car j’aime Paris plus que tout autre endroit (j’ai eu assez de mal pour m’y installer, en choisissant mon quartier), et le reste du monde, que j’ai un peu sillonné, ne m’intéresse en rien : ne me parlez pas de l’Afrique, que je connais assez bien, et jamais je ne mettrais les pieds aux États-Unis, qui incarnent tout ce que je déteste. Et puis, prendre l’avion, merci ! Mon « empreinte carbone » [sic], vous y pensez ?
Non, la vérité est que mes vacances sont à comprendre au sens médical : hier, j’ai eu ma dernière convocation avec mon hématologue, qui tente depuis trois ans de comprendre pour quelle raison mon taux de plaquettes sanguines s’est effondré à partir de février 2016. Les plaquettes sanguines sont des cellules sans noyau, formées dans la moelle osseuse, et qui, à la moindre coupure, sont censées s’y précipiter afin de boucher le trou – le doigt du petit garçon dans ce conte où il bouchait le trou apparu dans un barrage menaçant sa ville. Je n’ai même pas le tiers du minimum admis par la médecine, et, logiquement, je devrais me vider de mon précieux sang à la moindre estafilade, mais nul, en dépit de tous les examens possibles, n’a jamais trouvé la cause de ce manque. Et, last but not least, je ne saigne jamais.
Cela dit, ça ne me trouble pas, car je n’ai pas d’autre symptôme annonçant ma disparition imminente. Vous ne vous débarrasserez pas si vite de mon encombrante personne. À moins que Castaner ou Macron m’envoient Benalla pour me persuader d’aller voir aux antipodes s’ils y sont, ce que personne ne souhaiterait à ces pauvres antipodes.
Ma prochaine consultation médicale sera pour ma cardiologue. Je l’ai connue dans un centre de santé municipal, où les consultations étaient et sont toujours gratuites, mais elle a préféré que je me rende désormais dans son cabinet privé, derrière l’Arc de Triomphe, sans doute parce qu’ainsi, elle peut facturer à la Sécu ses consultations au prix fort. Je ne suis pas dupe, puisque, d’une part, je ne paie toujours rien, et que, d’autre part, je lui suis reconnaissant de m’avoir sauvé la vie en étant le seul médecin qui s’est intéressé à une malformation cardiaque menaçant l’intégrité de mon artère aorte depuis des décennies : cette dame m’a expédié illico chez un chirurgien de ses amis, qui a réglé le problème en me posant, en quatre heures, à l’intérieur de l’aorte, un stent en dacron (cherchez « endoprothèse » sur YouTube, vous verrez, c’est passionnant) fabriqué sur mesure à Londres.
Seul inconvénient, ce déplacement m’oblige à me rendre aux Champs-Élysées, un endroit que je n’aime pas plus que les States. Mais que ne ferait-on pas pour faire plaisir à son médecin ?