Souvenirs qui s’effacent ?
Les psys (psychiatres, psychologues, psychanalystes) ne manquent pas d’arrogance, et nous assènent leurs convictions avec toute l’autorité du scientifique, alors que, souvent, ces convictions ne reposent que sur des suppositions hasardeuses.
En voici une, de supposition hasardeuse : plus un enfant est jeune, plus sa mémoire est faillible. Autrement dit, il aura d’autant plus de mal à se souvenir des évènements si ces évènements sont lointains. Et j’ai entendu ce matin, dans un feuilleton télévisé, un de ces zozos affirmer que si on montrait chaque jour à un enfant de trois ans un dessin animé, mais que l’on cessait brusquement de lui montrer ce dessin animé, il n’en garderait plus aucun souvenir un an plus tard, et ne le reconnaîtrait donc absolument pas.
Je suis persuadé du contraire, et pardonnez-moi d’expliquer pourquoi, en citant ma propre personne.
Mes parents et moi-même avons quitté notre ville natale, pour aller nous installer au Sahara, dans une petite ville où mon père avait été nommé. Lorsque nous nous y sommes installés, j’avais un an. Mais, un an et demi plus tard, mon père a été rappelé dans l’armée, et il a dû nous quitter pour plusieurs mois. Dix-huit mois, en fait. Or, peu avant son départ, mes parents et moi étions allés voir un film dans le seul cinéma de la ville, et une scène m’avait frappé : elle se passait en Afrique, et on y voyait des Noirs assez légèrement vêtus et qui dansaient une danse locale, en agitant leurs boucliers et leurs lances. Cette séquence, montrant une scène que je n’avais évidemment jamais vue dans la réalité, s’était gravée dans ma mémoire, et y était restée des années entières. Un paquet d’années, et je ne l’ai jamais oubliée, seuls le contexte et la signification de ce que j’avais vu m’échappait.
Mon père n’est revenu au sein de notre famille qu’un an et demi plus tard, alors que ma mère et moi avions regagné notre ville natale, et jamais nous ne sommes retournés dans notre ancienne ville saharienne. Mais le souvenir des Noirs dansants persistait, malheureusement j’étais incapable de dire de quel film il s’agissait !
Or, bien des années plus tard, regardant la télévision sur Arte, je suis tombé sur le même film, très reconnaissable, avec la même scène exactement. Et j’ai enfin pu mettre un titre sur ce film très connu, puisqu’il s’agissait du premier film de Tarzan, avec Johnny Weissmuller, intitulé Tarzan the Ape Man (en français, Tarzan l’homme singe).
Comment le souvenir de la fameuse scène de danse était-il resté gravé dans ma mémoire et durant autant d’années, aucun charlatan expert en psychiatrie ne l’aurait jamais expliqué, car il contredisait toutes les théories bien tranchées de ces messieurs !