Claude Allègre
Le sport à la mode, en ce moment, c’est de taper sur Claude Allègre. Du « Canard enchaîné » aux zozos de bakchich.info, tout le monde s’y met, je n’ose pas ajouter « allègrement ». Et comme l’imagination, depuis 1968, n’a pas encore accédé au pouvoir, on ressasse jour après jour les mêmes platitudes.
Résumons les griefs anti-Allègre : 1. il a envie d’être ministre ; 2. il a dit un jour, il y a très longtemps, le 24 juin 1997, que, chargé de l’Éducation nationale, il avait l’intention de « dégraisser le mammouth » ; et 3. il conteste le réchauffement généralisé de la planète.
Point 1, on voit mal en quoi il est répréhensible de vouloir être ministre, si l’on a des idées sur le poste envisagé. Être ministre, ce n’est pas précisément une sinécure, et c’est mal payé ! Dans le privé, Allègre ferait fortune, il a préféré la science et l’enseignement, c’est stupide de lui reprocher une ambition politique. Montrez-moi un Français qui ne voudrait pas être (et ne s’estimerait pas capable d’être) ministre !
Point 2, dégraisser le mammouth : les syndicats, d’entrée de jeu, ont détesté Allègre, parce que, contrairement à la totalité de ses prédécesseurs à l’Éducation Nationale, il ne tremblait pas devant eux et les tenait pour ce qu’ils sont, des privilégiés accrochés à leur pouvoir, et champions de l’immobilisme. On ne sait trop quel est le mot qui leur a déplu, dégraisser ou mammouth, dont aucun n’est désobligeant, mais ils ont feint de s’en offusquer, ravis, en fait, d’avoir un prétexte pour attaquer quelqu’un qui les voyait tels qu’ils sont. En réalité, l’expression pittoresque employée par Allègre désignait un plan très sérieux, dont on peut trouver le détail ICI, et qui malheureusement n’a pu être mis en œuvre, justement parce que l’Éducation nationale possède des institutions pachydermiques auxquelles il est inconvenant de toucher, dont il est inconvenant de parler.
Point 3, on en reparlera, c’est trop complexe pour être expédié en quelques phrases. Disons qu’Allègre ne hurle pas avec les loups. Qui nous garantit que ses adversaires ont raison, dès lors que ce qu’ils prédisent n’est pas encore arrivé et ne devrait se produire que dans un avenir très lointain ? Il y a dix ans, nous étions tous menacés de mort à cause de la vache folle ; il y a deux ans, c’était la grippe aviaire ; il y a cinquante ans, la bombe atomique allait vitrifier la planète, etc. Or on a vu ce qui s’est passé...
La France est un pays formidable : tout le monde fustige la langue de bois des politiques, mais dès qu’il s’en trouve un qui parle clair et sans détour, chacun lui tombe dessus. Le précédent, c’était Charasse, et l’on sait qu’il n’a pas fait une grande carrière.