Une pomme, deux poires... et des pépins
L’épisode biblique d’Ève incitant Adam à « croquer la pomme », ce qui leur valut à tous deux d’être chassés du paradis, est très connu, mais aussi très fantaisiste. Il se situe au début de l’Ancien Testament, au chapitre III de la Genèse, et contient plusieurs détails intéressants.
D’abord, il n’est nulle part question de pomme ! Au chapitre précédent (II, 17), Adam se voit intimer l’ordre de ne pas manger « le fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal », sous peine de connaître la mort. Quel était ce fruit ? On n’en sait rien. Tout porte à croire que ce n’était pas un vrai fruit, et que cette expression est hautement symbolique. Et puis, alors que les exégètes qui prennent cette histoire au sérieux situent le paradis quelque part entre le Tigre et l’Euphrate, c’est-à-dire en Irak ou à la rigueur dans les environs, la pomme n’est certainement pas un fruit de la région !
Le deuxième détail curieux, c’est le serpent : Ève aurait été tentée par un serpent, « le plus rusé de tous les animaux sauvages », affirme la première phrase du chapitre III. Or c’est l’un des deux seuls cas, dans toute la Bible, où un animal parle ! De toute évidence, là encore, il ne s’agit pas d’un véritable serpent. Mais nul n’a élucidé ce mystère zoologique...
Enfin, et c’est un détail que les prêtres évitent de mettre en lumière dans leurs sermons du dimanche matin, on peut lire ceci au verset 22 : « Voilà que l’homme est devenu comme l’un de nous pour la connaissance du bien et du mal ». Scandale ! « L’un de NOUS » ? Il y avait donc plusieurs dieux ? Impossible de prétendre qu’il s’agissait, dans la bouche de Dieu, d’un pluriel de majesté : d’une part, le pluriel de majesté n’a aucun sens en hébreu, langue dans lequel l’Ancien Testament a été écrit ; d’autre part, le pluriel de majesté consiste pour un souverain à dire « Nous », pas « l’UN de nous ».
On a tort de ne pas lire davantage la Bible. J’ai connu des athées obtus (il existe des athées qui ne sont pas obtus) qui se cantonnaient à l’attitude classique du « Je ne veux pas connaître ces élucubrations », oubliant que toute notre civilisation est fondée là-dessus, et que ce n’est pas plus mal de savoir d’où l’on vient et d’avoir connaissance des armes de ses éventuels adversaires.