Où commence une dictature ?
D’accord, la France n’est pas une dictature, et Sarkozy n’est pas Hitler. Il n’empêche : Julien Coupat est en prison depuis le 15 novembre 2008, et on le détient sans la moindre preuve. Officiellement, il est seulement soupçonné d’appartenir à un groupuscule de « l’ultra-gauche, mouvance anarcho-autonome », ce qui ne veut strictement rien dire et ne relève que du fantasme sécuritaire : faire peur au bourgeois avec des histoires de terrorisme bidons, ça s’est déjà fait, y compris chez nous.
Pour ne rien arranger, les journaux français s’abstiennent soigneusement d’en parler. Ou si peu... Rappelons que, lors des grandes affaires de prises d’otages, dans l’autre siècle, toutes les chaînes de télévision, CHAQUE JOUR, ouvraient leur journal en rappelant le nombre de jours de détention des victimes, que cela a continué, parfois pendant des années, jusqu’à leur libération, et que le procédé, quoique atténué, a été repris pour Ingrid Betancourt. Pourquoi ne pas le faire pour Julien Coupat ? Parce que les ravisseurs sont au ministère de l’Intérieur ?
Et puis, le fait qu’un pays soit démocratique n’est pas une garantie. Les États-Unis sont une démocratie, et leurs journaux sont plus puissants et plus pugnaces que les nôtres. Or cela n’a pas empêché Bush, qui est pourtant un personnage sans envergure, d’y instaurer un drôle de régime, et son Guantanamo n’a pas grand-chose à envier au bagne de Cayenne d’autrefois. Il a pratiquement fait inscrire la torture dans la Constitution de son pays, et, en outre, créé des prisons secrètes un peu partout dans le monde, pour y faire torturer à l’aise, et hors du sol national, de simples suspects. Ce qui est arrivé là-bas peut se produire chez nous.