Brice Hortefeux réédite « Orange mécanique »

Publié le par Yves-André Samère

D’abord, rappelons aux distraits que la fameuse vidéo qui accuse Hortefeux de racisme n’est pas un document « volé » ou pris à l’insu du coupable, puisqu’il s’agit d’un reportage de la chaîne de télévision Public Sénat, qui est une chaîne publique, comme son nom l’indique, et fonctionne avec l’argent de l’État. Ce reportage a été fait par des journalistes professionnels, qui ne se cachaient nullement, et l’affaire est sortie sur le blog du journal « Le Monde », qui n’est pas la première feuille de chou venue mais quasiment le premier journal français d’information.

Quant au piètre démenti du ministre, il a été totalement anéanti le vendredi 11 septembre 2009 par l’analyse qu’en a faite Didier Porte sur France Inter, à sa manière satirique habituelle, et que vous pourrez écouter ICI. Ce démenti a été complété par diverses interventions des collègues du ministre, sur un ton convaincant qui faisait plaisir à voir ; par Sarkozy lui-même, qui a déclaré qu’il avait autre chose à foutre ; et par une autre vidéo, une déclaration d’Amine, le jeune Arabe qu’Hortefeux visait. Cette vidéo tentait elle aussi de disculper le ministre, or un détail que, semble-t-il, nul n’a relevé, m’a « interpellé au niveau du vécu », comme disait naguère José Artur.

Ce détail, c’est ceci : à deux reprises, en disant son texte, le jeune Amine a laissé son regard se porter, non vers la caméra à laquelle il s’adressait, mais au-dessus de la caméra ; autrement dit, il LISAIT ce qu’il déclarait, sur un prompteur ou sur un carton quelconque. Si bien que cette manifestation d’une touchante spontanéité m’a rappelé un film, que Stanley Kubrick a réalisé en 1971 d’après le roman d’Anthony Burgess, Orange mécanique. Dans ce film, Alex, un jeune voyou, a été emprisonné pour meurtre, et il bénéficie d’un traitement chimique destiné à lui ôter toutes ses tendances à la violence – l’ultraviolence, comme on disait alors, histoire de préfigurer l’ultragauche qui ravage aujourd’hui le pays terrorisé. Puis Alex est libéré, mais il est devenu incapable de se défendre, et une succession d’évènements le conduisent à une tentative de suicide. La presse alors s’empare de l’affaire et couvre de boue le gouvernement. En catastrophe, le ministre de l’Intérieur rend visite au blessé, à l’hôpital, et lui offre une sinécure très bien payée, en échange de quoi la victime devra faire une déclaration favorable au ministre. Marché conclu, on fait entrer les journalistes pour immortaliser l’évènement, et le mini de l’Inter, comme écrit Burgess, est filmé en train de se congratuler avec Alex. De sorte que tout rentre dans l’ordre, pour le bonheur de deux parties : la presse n’a plus qu’à la boucler, comme elle sait si bien le faire parfois, et l’opposition, pareillement.

La fiction précède toujours la réalité.

Écrire ci-dessous une ânerie quelconque :