Aller à Bangkok ? Non, merci !
Hier, un lecteur qui vit à Bangkok (si-si !) est tombé sur un article que j’avais écrit pour plaisanter sur une « offre » que j’avais reçue, et où l’on m’invitait (sic), moyennant finances, à faire un voyage en Thaïlande. J’avais remarqué que, non merci, ce pays ravagé par la drogue, la prostitution et la délinquance, sans compter la tourista propre aux contrées tropicales, ne me tentait pas du tout, et que, de toute façon, j’avais lu Emmanuelle.
Ce lecteur, dont le degré d’accessibilité à l’humour est digne de son orthographe, me traînait un peu dans la boue, et, comme toujours en pareil cas, supposait que, pour avoir critiqué un pays étranger, il était hors de doute que je n’étais jamais sorti de mon village. Classique, je connais le procédé par cœur. En d’autres occasions, on met en doute, non pas mon expérience de globe-trotter, mais ma culture, et je suis soupçonné alors de ne lire que « Voici ». En l’occurrence, ayant mentionné Emmanuelle, je puisais DONC mes renseignements dans « un livre érotique vieux de trente ans ». En fait, Emmanuelle a été publié pour la première fois en 1959, mais passons. Et je signale à ce visiteur, histoire de remonter dans son estime, que j’ai aussi lu San-Antonio ! (NB : Frédéric Dard détestait Bangkok, et en a dit pis que pendre)
Petite mise au point tout de même : les cinq romans sur le personnage d’Emmanuelle étaient signés par Emmanuelle Arsan, morte d’un cancer en 2005, qui s’appelait en réalité Marayat Bibidh, et qui, bel et bien née à Bangkok, était d’origine thaïlandaise, donc savait parfaitement de quoi elle parlait. Très cultivée, dotée en français d’un style impeccable et recherché, elle avait épousé un diplomate français, Louis-Jacques Rollet-Andriane, et a publié de nombreux livres, pas tous érotiques. Vous l’avez peut-être vue au cinéma, dans La canonnière du Yang-Tsé, film très connu de Robert Wise, sorti en 1966, où elle jouait Maily. Elle était plutôt jolie, ce qui a fait suspecter qu’elle n’écrivait pas elle-même. Mais, faute d’être macho, je ne reprends pas à mon compte ce soupçon désobligeant.