Dénigrer Desproges pour justifier Guillon
« Jacques Séguéla est-il un con ? De deux choses l’une : ou bien Jacques Séguéla est un con, et ça m’étonnerait tout de même un peu, ou bien Jacques Séguéla n’est pas un con, et ça m’étonnerait quand même beaucoup ».
Pour tenter de laver Stéphane Guillon de l’accusation d’avoir insulté le ministre Éric Besson, on a entendu ce matin sur France Inter un employé du nettoyage citer cette introduction au réquisitoire de Pierre Desproges, diffusé sur la même radio le 25 octobre 1982. Et de rappeler finement que Desproges, devenu l’idole des humoristes, ne s’est jamais vu reprocher cette phrase.
Mille excuses, messieurs de la radio, mais quand on cite, il faut citer sérieusement, c’est-à-dire, non seulement donner le texte complet, mais aussi préciser les circonstances ! Le texte qui n’a pas été cité et ne l’est d’ailleurs jamais, c’est celui-ci : « Il y a moins d’un an, Jacques Séguéla a souhaité retirer de l’antenne une émission dont j’étais responsable. Il était mécontent des conneries proférées, non pas par moi, mais par lui dans cette émission. [...] Le fait de regretter d’avoir dit des conneries n’est pas la preuve qu’on est con soi-même. C’est même exactement le contraire ». (La même histoire m’est arrivée, quand j’avais dit des bêtises au micro à propos d’un film de Luc Besson, dans Le masque et la plume, et que j’ai demandé à Jérôme Garcin de couper mon intervention)
Les circonstances sont les suivantes. D’abord, Desproges ne se cachait pas derrière un micro, il était dans le même studio que Séguéla, celui du Tribunal des Flagrants Délires, face à « l’accusé ». Et Séguéla se marrait intensément. Ensuite, ces deux-là ne se haïsssaient pas, ils étaient même plus ou moins copains, et avaient déjà participé ensemble à une émission d’humour, celle dont il est question plus haut et qui était passée sur Radio Monte-Carlo. D’ailleurs, un peu plus loin, au Tribunal, Desproges compare Séguéla à une dinde, et fait mine de s’excuser auprès du syndicat des dindes – blague qui a été reprise deux fois : quand le Bébête Show de Stéphane Collaro comparait Mitterrand à une grenouille, et que la marionnette de Gaston Defferre, ministre de l’intérieur, prétendit ensuite avoir reçu une protestation du syndicat des grenouilles ; et lorsque, vendredi dernier, François Morel, rappelant qu’Éric Besson avait été comparé à une fouine, « s’excusa » auprès du syndicat des fouines. Comme quoi, c’est dans les vieilles marmites qu’on fait la meilleure soupe.