« Éructer » ?
Je ne dois pas être très intelligent, puisqu’il y a toujours des notions qui m’échappent. Ainsi, je comprends assez mal que, lorsqu’on veut s’en prendre à quelqu’un, on utilise un biais, et qu’on l’attaque sur autre chose que le grief qui peut – ou doit – lui être fait. Vous ne comprenez pas ? Vous avez raison, dit ainsi, ce n’est pas très clair. Voici donc un exemple qui vous illuminera certainement.
Le Pen parle beaucoup, c’est indéniable, et les propos qu’il lui arrive de tenir ne font pas l’unanimité, j’en conviens. Cela étant admis, pourquoi faudrait-il dire systématiquement, comme le font les gens des médias, que Le Pen « éructe » lorsqu’il dit quelque chose en public ? Cette manie, je l’ai relevée à peu près partout. Dans « Le Canard enchaîné », quasiment chaque fois qu’il cite l’ex-président du Front National, et depuis toujours ; ou encore, cette semaine, chez Didier Porte, dans sa chronique d’Arrêt sur images. Or c’est non seulement malveillant, mais aussi c’est idiot, et témoigne qu’on ignore le sens des mots.
Éructer... J’ai consulté mes dictionnaires, ils sont unanimes et sans ambigüité. L’éructation, ils la définissent uniquement comme une « émission sonore, par la bouche, de gaz provenant de l’estomac » – pratique considérée comme très élégante en pays arabe à la fin d’un repas, puisqu’elle sous-entend qu’on a très bien mangé, donc merci à Dieu (« Hamdoullah », ne manque-t-on jamais d’ajouter) et à la maîtresse de maison, mais qui, ailleurs, est très grossière et ne se conçoit pas en société. Inutile que je traduise le verbe en langage courant, vous l’avez sur la langue, si j’ose dire et pour ne pas quitter l’appareil digestif ! Or je défie quiconque d’avoir jamais pris Le Pen en flagrant délit d’éructation, en tout cas publiquement.
Il s’ensuit que l’en accuser est diffamatoire, et j’en reviens au fond : accusez Le Pen d’être un facho, un antisémite ou un sympathisant néo-nazi, et je signerai à deux mains, si vous le voulez bien. Mais visez la bonne cible, et n’inventez pas une grossièreté imaginaire.
(Je précise encore et toujours, pour les éventuels imbéciles qui n’auraient pas compris, que les lignes qui précèdent ne sont pas une défense d’un homme politique aux idées qui me dégoûtent depuis toujours)