Frédéric Mitterrand : encore une peau de banane
Ouf ! Ce n’est pas fini. On craignait qu’après la si éblouissante défense de Frédéric Mitterrand sur TF1 (il mérite vraiment d’être le ministre de la Communication), la polémique se calme. Heureusement, Frédo veille à ne pas laisser retomber la mayonnaise. Vendredi, des bienveillants exhumaient un témoignage de moralité qu’il avait envoyé, depuis la Villa Médicis dont il était alors le patron, à deux violeurs qu’il connaissait à peine. Mais cela ne suffisait pas.
Il se trouve qu’un certain Philippe Barassat, réalisateur de cinéma, avait tourné en 1995 un court-métrage de 16 minutes et 54 secondes intitulé Mon copain Rachid (visible ici), et lorsqu’il fut question, en 1998, de le passer dans les salles de cinéma, on y colla un prologue de 89 secondes où l’on voyait Frédéric Mitterrand lire un texte de Camus, texte dans lequel l’auteur disait qu’il ne comprenait pas très bien la notion de péché, et concluait que « vivre, ce n’est pas se résigner ». Cet extrait ne contenait donc rien qui concernât la pédophilie. C’est ce prologue qui revient sous forme de peau de banane amicalement glissée sous les escarpins de Frédo par « Numérama », un magazine sur Internet, via un article signé d’un certain Guillaume Champeau.
Le film lui-même est sans doute assez anodin dans sa mise en scène, un peu plus audacieux dans son dialogue, et n’a sans doute que le défaut d’être sonorisé avec le Requiem de Mozart, qui est complètement saugrenu dans le contexte. Son narrateur est un jeune garçon d’une dizaine d’années, Éric, fasciné par le sexe, certes de taille respectable (on l’entrevoit durant une seconde), de son copain Rachid, garçon de quinze ans. Il demande souvent à le voir et même à le toucher, mais Rachid n’accepte qu’en étant payé, en vertu de cette idéologie qui a cours partout, dans les pays arabes, et qui prétend qu’on « n’est pas pédé » tant qu’on se fait payer. Des années plus tard, alors que les deux garçons se sont perdus de vue, Éric est marié et père de famille, tandis que Rachid est devenu prostitué.
Naturellement, ce film est un peu dérangeant, et pour deux raisons : c’est le plus jeune qui est demandeur, et l’acte de palpation supposé pédophile n’a aucune conséquence traumatisante pour lui ! Notre époque refuse – et surtout nie, ce qui est entièrement idéologique – la possibilité de ces deux aspects. En somme, le film dédramatisait les actes, alors que tout nous enjoint aujourd’hui à les condamner.
Ce qui peut nous inciter à nous tordre de rire, c’est de constater combien les opinions changent avec le temps. Lors de la sortie du film, il n’avait suscité aucune réaction hostile, et le journal « Libération » l’avait trouvé « réussi », « inspiré » et « très charmant », tandis que « Chronicart » y voyait un film destiné à « faire éclater les frontières ». En attendant, c’est la carrière de Frédéric Mitterrand qui éclate, mais par petits morceaux.