Ignorance du spécialiste

Publié le par Yves-André Samère

Je me marre (méchamment) : dimanche dernier, 25 mars, dans l’émission de France Inter Le masque et la plume, le critique littéraire Arnaud Viviant avoue qu’il a découvert, dans les pages de Fukushima, dans la zone interdite, de William T. Volmann – l’un des livres critiqués ce soir-là –, le verbe interpoler, « que je ne connaissais pas », dit-il.

(Rappelons, à ceux qui n’étaient pas là, qu’on fait une interpolation quand on insère dans un texte un passage qui, à l’origine, ne s’y trouvait pas. La Bible en est farcie)

Pour Arnaud Viviant, un grand bravo et l’expression de ma reconnaissance, c’est le genre d’anecdote dont je suis friand, les aveux de ces spécialistes qui ignorent un élément de leur propre spécialité.

Naguère, j’avais entendu un écrivain, Jérôme Duhamel, également éditeur chaque année d’un bêtisier visant ses confrères, avouer qu’il ne connaissait pas le nom didascalie, terme qui désigne les indications scéniques qu’un auteur de théâtre insère entre les répliques de ses personnages (Feydeau et Agatha Christie en sont très prodigues). Plus récemment, le critique figaresque Éric Neuhoff, à propos d’un film sorti récemment, le désignait comme «  cet American graffiti vingt ans après ». Tout à fait, Éric. American graffiti, le film qui a fait connaître George Lucas, est sorti en... 1973 ! Donc trente-neuf ans après. Encore plus récemment, dans le dernier « Figaroscope », Valérie Duponchelle estime que, dans le film de Tim Burton Corpse bride, la mariée est « couturée comme Frankenstein » : si elle avait vu ou lu Frankenstein, elle saurait que c’est la Créature qui est couturée, pas le docteur Frankenstein qui l’a fabriquée !

Ne désespérons pas, un de ces jours, on entendra sans doute un pianiste virtuose nous révéler qu’il ne savait pas que les pianos ont des pédales ; un biologiste, se demander à quoi sert un microscope ; et un homme de radio, s’interroger sur ce que peuvent bien être ces machins qu’on lui met sous le nez quand il parle et qui est doté d’une bonnette en mousse, avec un fil au bout.

Écrire ci-dessous une ânerie quelconque :

K
J'ai encore la mienne. Un bien bel objet,avec son beau curseur transparent. Elle a été ma 'calculette' tout le temps de mes études à l'ENCPB. Il y bien longtemps hélas.
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Y
Ce qui est drôle, c’est que j’ai tenté de faire la même chose ! À 14 ans, j’ai découvert les logarithmes dans un vieux livre de classe ayant appartenu à une de mes tantes, mais il n’y<br /> avait qu’un très court extrait des tables de Bouvard et Ratinet. J’ai donc voulu reconstituer ce qui manquait, mais, naturellement, ça ne pouvait pas aller bien loin.<br /> <br /> Très déçu ensuite de constater qu’on n’enseignait pas les logarithmes dans le deuxième cycle. Y compris en Terminale de l’École Normale où je suis entré tout de suite après cette<br /> découverte !<br /> <br /> Aujourd’hui, les calculatrices s’occupent de tout. On ne trouve même plus de règle à calcul...
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K
Merci pour cette définition de l'interpolation. Je ne connaissais que celle, mathématique, du temps où j'interpolais(?) une valeur entre deux logarithmes en m'aidant de la célèbre "table des<br /> logarithme" ouvrage long et mince qui a disparu dans les limbes.<br /> vision du passé içi:http://www.decitre.fr/livres/NOUVELLES-TABLES-DE-LOGARITHMES-A-CINQ-DECIMALES.aspx/9782010006685<br /> bye
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