Journaux tricheurs

Publié le par Yves-André Samère

La presse sous toutes ses formes se nourrit fréquemment de photos extraites d’un reportage filmé ou d’une émission de télé, et, d’un instantané, tire toutes sortes de conclusions. Est-ce probant ? Pas du tout !

Le meilleur exemple en a été donné cette semaine. Invités au Grand Journal sur Canal Plus, Louis Aliot, adjoint de Marine Le Pen au Front National (et, accessoirement, l’homme de sa vie), était assis à côté de Nadine Morano. Or, à un moment donné, madame Morano, répondant à je ne sais plus quelle badinerie de son voisin, a, très furtivement, posé sa main droite sur l’épaule gauche de ce monsieur. Circonstance aggravante, l’atmosphère du plateau, à cet instant précis, était à la rigolade généralisée, de sorte que les deux protagonistes, ainsi que le troisième invité, une socialiste, Najat Vallaud-Belkacem, se fendaient la pipe tous en cœur.

Ce court instant isolé, quoique n’ayant pas duré plus d’un quart de seconde et donc ne signifiant rien sur le plan idéologique, a été repris par la plupart des journaux, et utilisé comme une « preuve » qu’il existe une connivence politique entre l’UMP et le FN ! Par exemple « Valeurs actuelles », dans son numéro du 3 mai 2012, qui publie la photo et lui donne comme sous-titre Séduction. Comme quoi, la droite place l’honnêteté au rang des valeurs actuelles ! La gauche aussi, je vous rassure, puisque « Le Nouvel Observateur » publie la vidéo (interminable : 25 minutes et 41 secondes ! On ne sait pas faire un montage au « Nouvel Obs », ou on est trop flemmard ?) et qu’un zozo de ce canard très porté sur la déontologie voit dans cette « scène troublante » ce qu’il appelle « une véritable séance de calinothérapie avec le leader frontiste » et « une bien basse tentative de drague du vote FN par l’UMP ». On n’a pas peur du ridicule, dans le journal de Jean Daniel.

On a connu des preuves plus solides. Mais ce procédé, dont le côté faux cul ne peut échapper à personne, est récurrent, et tous les journaux y ont recours, spécialement pour leur première page. J’ai récemment revu cette photo de De Gaulle arborant, l’espace d’un instant, un air très fatigué, et de laquelle on avait conclu qu’il était fichu et prêt à prendre sa retraite. Ce qui ne s’est produit que des années plus tard. Il en existe une autre, que j’ai dans ma collection, où on le voit ratant une marche dans un escalier et tombant sur le dos. Inévitablement, un magazine d’extrême droite en avait fait ses choux gras. Les autres journaux n’ont pas osé.

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