Le petit doigt sur la couture du pantalon
En dépit de ses défauts qui tiennent à ce type d’émission en public, le Grand Journal de Canal Plus ne peut pas être boycotté, car il contient toujours des séquences intéressantes ou réjouissantes. Je ne parle pas de la météo, depuis que Pauline Lefèvre a été remplacée par une horripilante Québécoise, pourvue d’une dent ébréchée dont je ne dois pas être le seul à être incommodé, porteuse en outre d’une vulgarité qu’on n’avait pas vue depuis la Minute blonde de triste mémoire. Je ne parle pas non plus de la qualité des invités, en général d’un tartignole qui dépasse la moyenne. Mais avouez que Yann Barthès ridiculisant chaque soir Sarkozy et les membres de son gouvernement, parfois en leur présence (ils font alors semblant de s’amuser), nous venge de posséder le régime le plus rétrograde d’Europe, Italie exceptée.
Mais un détail ne cessera jamais de m’horripiler, c’est le public. Et pour plusieurs raisons. D’abord, il est d’une docilité à faire douter que les Français soient frondeurs : il obéit au doigt et à l’œil au chauffeur de salle, au point d’applaudir les invités AVANT même qu’ils aient fait leur apparition dans le studio : c’est beau, la confiance ! Regardez bien, c’est burlesque. Or, ensuite, la consigne d’applaudir tombe au moins une fois par minute, et ce crépitement quasi-incessant vous ferait souhaiter d’avoir l’ouïe un peu moins fine que celle de Liliane Bettencourt.
Et puis, il y a la composition du public : c’est flagrant, au Grand Journal, on n’aime pas les plus de trente ans ! Rien que des jeunes, surtout des filles, et pas les plus moches. Ce qui amène à se poser une question : attendu que les candidats désireux d’assister à l’émission doivent s’inscrire par téléphone, comment font les chargés du recrutement pour éliminer les vieux ? On leur demande leur âge ? Et s’ils ne peuvent satisfaire au critère souhaité, comment les décourage-t-on ? On leur balance un « Désolé, vous avez un pied dans la tombe, passez-nous plutôt votre petite-fille » ?
Le cynisme de la télé dit tout sur notre époque et notre civilisation.