Marié à B.B., on échappait au service militaire
On commémore quelques évènements, en ce mois de novembre. Remarquons toutefois qu’on a oublié l’assassinat de Kennedy ! Mais cela viendra peut-être, il reste une semaine pour y penser. Remarque annexe, chaque fois qu’un Français mentionne son assassin prétendu, Lee Harvey Oswald, il prononce bizarrement « os-valde » ( je l’ai encore entendu cette semaine), alors que, pour quiconque a jamais écouté une radio du pays, les États-Unis, il est évident qu’on doit dire « ass-ouolde ». C’est absolument incontestable, mais rien n’y fait.
En France, peu de choses. Si, pourtant, une petite curiosité. Il y a cinquante ans, nous étions en pleine guerre d’Algérie, même si on la baptisait autrement : les « évènements », le maintien de l’ordre, etc. Toujours est-il que le service militaire, qui durait légalement dix-huit mois avant la guerre, avait vu sa durée portée à vingt-sept mois. Dès lors, les appelés étaient officiellement catalogués PDL (pendant la durée légale) sur leurs dix-huit premiers mois, puis ADL (au-delà de la durée légale) après ce délai. Si-si ! Après le cessez-le-feu, la durée redevint progressivement ce qu’elle était auparavant.
Bien entendu, les jeunes ne se bousculaient pas pour s’engager dans l’armée. C’est bien plutôt le contraire. Mais les exemptions de service militaire s’étaient faites rarissimes, pour des raisons évidentes, et une seule exception est restée dans les mémoires, celle de Jacques Charrier.
Ce Jacques Charrier était un jeune acteur, et, en 1959, date à laquelle il aurait dû être incorporé dans l’armée, il avait 23 ans. Or il avait une intéressante particularité : le 18 juin précédent, il avait épousé une femme de deux ans plus âgée que lui, qui n’était autre que Brigitte Bardot ! Ils s’étaient connus sur le tournage de Babette s’en va-t-en guerre, et B.B. avait ainsi conclu son deuxième mariage – le premier, avec Roger Vadim, n’ayant pas duré. C’est d’ailleurs Charrier qui fut le père du seul enfant de B.B., Nicolas, qu’elle n’a jamais élevé. Toujours est-il qu’appelé sous les drapeaux en novembre suivant, Charrier déclara ne pas pouvoir supporter la vie commune, dans une chambrée, en compagnie de camarades qui, presque tous, épinglaient la photo dénudée de sa propre femme au-dessus de leur lit.
Comme l’autorité militaire l’avait envoyer bouler, il avança que sa propre mère était malade et qu’il devait veiller sur elle, mais cela ne marcha pas non plus : cet argument servait beaucoup, à l’époque. Ainsi, Georges Poujouly, autre acteur, l’ex-petit garçon dans le film Jeux interdits, en usa également, mais lui alla jusqu’à la tentative de suicide ; ce jeune homme, d’ailleurs bon acteur, avait aussi tourné avec Brigitte, mais c’était dans Et Dieu... créa la femme, trop tôt donc, en 1956 ; il n’avait alors que 16 ans, et B.B. n’avait d’yeux que pour Jean-Louis Trintignant.
Pour en revenir à Charrier, de guerre lasse, si l’on peut dire, il se trouva pour finir une maladie des yeux, et la chère autorité militaire, qui en avait ras le képi, sauta sur l’occasion et... ferma enfin les siens. Jacques Charrier fut dispensé de service militaire. Il n’est pas interdit de supposer que quelques coups de piston furent donnés, ni de rappeler que De Gaulle adorait Brigitte Bardot.
En tout cas, les mauvaises langues qui ne manquèrent pas de répandre qu’il suffisait de coucher avec Bardot pour éviter le service militaire en furent pour leurs frais, car le ménage Charrier divorça en janvier 1963. Plus tard, il fit un procès à son ex-femme, à cause du livre qu’elle avait publié, Initiales BB, et le gagna parce que sa vie privée avait été violée. Mais cela est une autre histoire.