Regretter un improbable procès

Publié le par Yves-André Samère

Cela ne pouvait pas manquer : dès ce matin, les « humanistes de gauche bien parisiens » dont Desproges se moquait commençaient à regretter que les policiers du RAID aient abattu Mohammed Merah, le tueur de Montauban et Toulouse, et déploraient qu’on ne l’ait pas plutôt arrêté pour le juger.

Il y a beaucoup à dire. Donc, analysons brièvement, en précisant tout de suite que ce qui suit n’est PAS un plaidoyer en faveur de la peine de mort.

D’abord, cet homme avait abattu quatre adultes (un juif et trois musulmans, ce qui est curieux pour un djihadiste) et trois enfants, puis blessé plusieurs policiers. Or, dans son esprit, ce n’était sans doute pas fini, puisque, dans la nuit du mardi 20 au mercredi 21, à une heure du matin, donc avant le siège de son immeuble, le tueur a téléphoné à France 24 depuis une cabine téléphonique. Il a obtenu au bout du fil Ebba Kalondoa, rédactrice en chef – qui est venue témoigner le soir même sur Canal Plus. La conversation a duré onze minutes, et le tueur, « très clair et très calme », a revendiqué les attentats. Le témoin rapporte qu’il parlait des « “cibles”, il était très détaché par rapport à l’humanité de ses victimes ». Il a donné les preuves matérielles que son appel était authentique, annoncé qu’il était affilié à Al-Qaïda, et surtout, que ce qu’il avait fait « n’était que le début » et qu’il y aurait d’autres attentats à Lyon, Marseille et Paris. Et il a ajouté « que deux choses pouvaient l’arrêter : soit on l’attrap[ait] et il ira[it] en prison la tête haute, soit il rencontrera[it] la mort avec un sourire ». Il a ajouté qu’il avait tout filmé et que ce « serait sur la toile prochainement », indice de sa vanité, qui concorde avec le fait de s’être vanté d’avoir « mis le pays à genoux ». Or, plus tard, durant le siège, il a fait marche arrière et refusé de se rendre. Ses intentions étaient donc très claires, on ne le prendrait pas vivant.

Voyons maintenant le point de vue des policiers : ils savent que l’homme est lourdement armé, consumé par la haine, et qu’il ne se rendra pas ; que, par conséquent, il va pratiquer la méthode de la terre brûlée : tuer le plus de monde possible avant d’être abattu. Que faire dans ce cas ? Espérer, prier, tâcher de l’amadouer par des considérations humanistes, lui promettre une impunité improbable ? Rien de tout cela n’est possible. Agressés par un homme qui tire sur eux, ils l’abattent, c’est de la légitime défense. On va peut-être objecter que cet homme était un pauvre fou, donc irresponsable. Irresponsable, mais de toute évidence irrécupérable. Car enfin, un chien atteint de la rage et qui mord les passants n’est pas davantage responsable, cependant on l’abat à la première occasion, pour qu’il ne fasse pas d’autres victimes. On peut déplorer ce recours à la manière forte, mais c’est un geste visant à protéger la collectivité, et foin de la sensiblerie.

Enfin, même si on l’avait capturé, la possibilité d’un procès me paraît très fantaisiste. Souvenez-vous du procès de Klaus Barbie, le bourreau nazi de Lyon, capturé en Amérique du Sud et jugé en France : après une déclaration liminaire, il a refusé de parler et d’assister aux audiences. C’est très classique. S’il y avait eu un procès, Merah n’aurait rien révélé.

Écrire ci-dessous une ânerie quelconque :

Y
Je ne cherche pas à convaincre. Je donne mon avis. Mes lecteurs sont assez grands pour se faire le leur.<br /> <br /> Le tueur a provoqué sa propre mort, en tirant sur les policiers, et en en blessant. Ils l’ont abattu en légitime défense. C’est à lui qu’il faut imputer cette fin.<br /> <br /> Quant au procès, je maintiens que personne n’en voulait, même si on affirme le contraire. Ni le tueur, qui a proclamé son intention de finir « les armes à la main », ni les autorités.<br /> Pourquoi ?<br /> <br /> Parce qu’un procès ne nous aurait rien appris, hormis ceci : en quoi consistait la personnalité du tueur (mais on la connaissait déjà, celle d’un esprit faible, gangrené par la propagande), et<br /> quels ont été les moyens qu’il a employés (mais la police les connaît déjà, et il n’y a pas pas lieu de les rendre publics, au risque de donner des idées à d’autres).<br /> <br /> Le seul procès à faire serait celui des services enquêteurs, qui n’ont pas été assez rapides, après les crimes de Montauban, pour empêcher ceux de Toulouse. Or ce genre de linge sale ne se lave pas<br /> non plus en public. Des têtes tomberont, mais dans la discrétion.
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D
Tsst, cher Ami, vous ne me convaincrez pas. Un procès, quelle que soit l'attitude du "suspect", aurait permis simplement de le mettre hors d'état de nuire, en notre nom à tous, sa culpabilité<br /> établie officiellement. Le reste, qu'il se taise ou non, quelle importance, il me semble qu'il y avait assez de preuves pour l'inculper et le condamner.<br /> On peut comprendre qu'il ait préféré la mort, les prisons françaises n'ont pas très bonne réputation, c'est le moins qu'on puisse dire.
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