Ma matinée chez les fachos
On a beaucoup dit que la manifestation d’hier matin, Place des Pyramides, organisée à l’initiative de Jean-Marie Le Pen, avait fait un bide, et que n’y assistaient qu’environ trois cents personnes. Eh bien je confirme, car... j’y étais. En effet, poussé par la curiosité, j’avais résolu d’aller voir les fachos en liberté, et je projetais de leur jeter des cacahouètes. Malheureusement, si j’ai bien trouvé des fachos, je n’ai pas trouvé de cacahouètes : on ne vendait que du muguet.
Je suis arrivé un peu en retard, car l’endroit était abondamment fliqué, donc difficile d’accès : il fallait suivre un trajet invraisemblable pour parvenir sur place, mais j’y suis arrivé, alors que la panne de micro qui a frappé le Menhir avait déjà commencé. Ne pouvant alors écouter le Grand Leader du Renouveau National, j’ai un peu laissé traîner mes oreilles et le magnétophone que j’avais dans ma poche gauche (oui, c’est sans doute le seul objet de gauche qui se trouvait alors en ce lieu), et je me suis régalé à l’écoute des adeptes du Front, euh... du Front Bas. Les amateurs de tératologie étaient à leur affaire, car la moisson était riche, et rarement j’avais entendu autant d’âneries, dont vous lirez un échantillon en commentaire de cette notule écrite ce matin.
Les journalistes, eux, s’ennuyaient un peu, puisqu’il ne se passait rien. Hormis ceux installés sur une estrade face à la statue de Jeanne la Pucelle, le menu fretin naviguait dans la foule, si peu dense qu’on pouvait s’infiltrer partout sans devoir jouer des coudes, ce que j’ai donc fait. J’ai reconnu Paul Moreira, l’équipe du Petit Journal, et Azzeddine Ahmed-Chaouch, accompagné de son cadreur et de son preneur de son. Une partie de ses activités a été diffusée le soir dans Quotidien, notamment sa conversation avec des badauds, qui tournait autour de Columbo, feuilleton dans lequel, a fait remarquer le reporter, le coupable est toujours pris et n’échappe jamais à la police (je me demande quels personnages réels étaient visés !). J’étais là, à moins de deux mètres, pas filmé heureusement, car j’ai ça en horreur. Il y a eu aussi l’intéressante confrontation avec ce gentleman qui a expliqué à Azzeddine pourquoi il le tenait pour un « bougnoule », terme que le camarade journaliste disait ignorer jusque là.
Mais la panne de micro ayant été réparée, Le Pen a pu faire son discours, très structuré, très écrit, et dont la conclusion s’articulait sur vingt suggestions de réformes urgentes que je détaillerai un peu dans un autre article, car ce n’était pas piqué des vers. Triomphe auprès de ce public d’ardents démocrates, évidemment, qui, avant de chanter La Marseillaise sur le signal du Führer, avait surtout applaudi les passages vitupérant les musulmans, l’ennemi de la civilisation que vous savez, et qui a été dénoncé ici même, peu avant midi, dans un commentaire de ce bloc-notes, par une aimable lectrice à laquelle j’ai répondu non moins aimablement et avec ma modération coutumière.