Soif d’aujourd’hui
Nous avons un État fort ! Quand un organisme, une profession, un clan représentent un danger public, les princes qui nous gouvernent, si prompts à légiférer pour fabriquer des lois inutiles (en général, ces nouvelles lois doublent d’autres existant déjà et qu’on a oublié d’appliquer), nos gouvernants, disais-je, pétrifiés de peur devant l’audace de déplaire, se rabattent sur la com’, et font appel au sens civique des auteurs de nuisance – qui doivent bien rigoler.
Ainsi, on n’a jamais légiféré pour lutter contre les boissons sucrées dont on gave les enfants, devenus incapables de boire de l’eau. Or on sait qu’en moyenne, aux États-Unis, les sodas que les jeunes ingurgitent sans arrêt représentent en moyenne 250 calories par jour, soit plus de 10 % de ce qu’apporte leur nourriture quotidienne. En dix ans, la consommation de boissons sucrées a augmenté de 30 %. Ce n’est pas mieux chez nous, et cela s’aggrave plutôt. Or, non seulement ces boissons contiennent une quantité importante de sucre, et d’une sorte de sucre qui n’est pas nécessaire au métabolisme, mais elles ne coupent pas la soif, au contraire. Autrement dit, plus on en boit, plus on a envie d’en boire.
La conséquence est visible à l’œil nu, les jeunes sont de plus en plus gros, y compris chez nous, où nous avons déjà 19 % de jeunes obèses. Non seulement c’est laid, mais c’est dangereux : diabète et maladies cardio-vasculaires, voilà ce qui attend les bâfreurs de sucre.
Que faire ? Pour réduire la consommation de tabac, on a commencé par le taxer lourdement, avant d’en interdire l’usage dans les lieux publics (dans les pays avancés seulement, et rappelons qu’en Afrique, la publicité pour le tabac et l’alcool est omniprésente à la télévision publique !). Alors, pourquoi ne pas en faire autant avec le sucre ? Bien entendu, les producteurs de sucre hurlent que ce serait une atteinte à la liberté individuelle, faisant mine d’oublier que la Sécurité Sociale paye les dégâts qu’ils provoquent.
Alors, comme d’habitude, nos dirigeants s’enfoncent la tête dans le sable, et sortent de pieuses maximes dans le genre de celle-ci : « Dans un premier temps, l’objectif est d’arriver à une régulation, sur la base du volontariat ». Les producteurs de sucre, « volontaires » pour réduire leurs bénéfices, attendons avec confiance...