Parents disparus
On signale la disparition des mots père et mère du vocabulaire français. Le ministère de l’Intérieur envisagerait de lancer un avis à la télévision, comme il le fait pour les disparitions d’enfants.
Chacun, en effet, peut le constater tous les jours : les enfants n’ont plus ni père ni mère. En un sens, c’est une bonne nouvelle, l’expression « tuer père et mère » n’a plus lieu d’être.
Le phénomène a commencé dans les émissions de variétés, comme celles de Michel Drucker : quel que soit l’âge de l’invité de la semaine, jamais le cher Michel ne lui parle de son père ni de sa mère, mais uniquement de son papa et de sa maman. Il faut attendrir le public, chacun peut comprendre ça, et, sur le plan de la nunucherie télévisuelle, les mots père et mère frisent l’obscénité. Puis Michel a fait tache d’huile, et c’est à présent les journaux radio- et télévisés qui sont touchés. Ainsi de cette fillette franco-russe que sa mère, privée du droit de garde après un divorce, avait enlevée (et qu’on a retrouvée pour la rendre à son père) : tous les journaux de France Inter parlent de sa « maman », et pas une fois, pas une, je n’ai entendu le mot « mère » dans les bulletins d’information sur ce fait divers.
On peut donc s’attendre à une progression du phénomène. Par exemple, Agrippine deviendrait la maman de Néron, Cronos serait le papa de Zeus, ou Médée, pour avoir tué ses enfants Phérès et Merméros, pourrait être vue comme une maman indigne, ce qui incite à une relative indulgence.
L’étape suivante pourrait concerner les autres liens familiaux. J’attends beaucoup du remplacement des termes oncle et tante par tonton et tata, ce serait moins formel, moins froid. Ainsi, en Angleterre, la princesse Anne deviendrait la « tata » du prince William. Tout de suite, cela rend plus proches du peuple ces hauts personnages un peu intimidants.