Enjoliveurs-22 : nettoyons le dictionnaire !

Publié le par Yves-André Samère

C’est décidé, je me range à l’avis de la majorité. Qui a toujours raison, sans quoi Sarkozy ne serait pas président de la République. Je cesse donc mes attaques viles et basses contre les enjoliveurs du langage, et, désormais, je parlerai comme tout le monde semble vouloir que je parle.

Ainsi, je ne dirai plus qu’un acteur est talentueux ; qu’à la campagne, une voiture est indispensable ; qu’un obstacle est insurmontable ; qu’une rivière est impraticable ; qu’un précipice est infranchissable ; qu’une recette de cuisine est alléchante ; qu’un exploit est indépassable ; que l’électricité est nécessaire ; que respecter le code de la route est obligatoire ; que respirer est vital ; qu’un bon enseignement est capital ; que la liberté est essentielle ; que les principes démocratiques sont fondamentaux.

Non, tout ça, c’est fini. Je m’en tiendrai à un seul terme, imaginé par un génie des médias, et aussitôt adopté par la quasi-totalité de ceux qui nous enchantent de leurs paroles et de leurs écrits. Par conséquent, je dirai qu’un acteur, une voiture, un obstacle, une rivière, un précipice, une recette de cuisine, un exploit, l’électricité, le respect du code de la route, l’air qu’on respire, un bon enseignement, la liberté et les principes démocratiques, toutes ces notions qui, c’est évident, désignent le même concept, sont incontournables !

Voilà, le Rubicon est franchi, et je vais à Canossa (quoique je me demande si Canossa se trouve bien de l’autre côté du Rubicon).

Et, plein de contrition, je n’emploierai plus des mots comme occasion (trop simple, trop facile, presque vulgaire, et qui a l’inconvénient d’être compris par tous) ou technique. N’avons-nous pas, pour les remplacer, opportunité et – malgré l’étymologie qui tente de nous faire croire que ce mot désigne l’étude des techniques – le précieux technologie ?

Écrire ci-dessous une ânerie quelconque :