Les nouvelles Halles de Paris
Ce matin, j’ai visité le chantier des Halles, et j’y suis resté plus longtemps que je le pensais, car j’ai eu la chance de tomber sur un guide très sympathique et ouvert, un jeune étudiant qui, mystérieusement, a semblé apprécier ma conversation davantage que celle des autres visiteurs. Mais ce mystère-là me dépasse, je ne feindrai donc pas d’en être l’organisateur (oui, j’aime bien caser cette citation de Cocteau, elle fait croire à mes lecteurs que je suis cultivé. Les pauvres, s’ils savaient...).
Les lieux ont énormément changé, et si vous connaissiez les Halles avant la rénovation, vous seriez surpris. La cour intérieure du Forum, à laquelle on pouvait accéder, soit par l’intérieur en utilisant les escaliers ou les escalators, soit par l’extérieur, en empruntant un plan incliné, n’existe plus. Reste un espace qui semble beaucoup plus grand, ce qui est assez surprenant étant donné que la surface libérée est rigoureusement la même que précédemment – il est vrai qu’on a rasé les commerces qui la bordaient, dont un fast food, sacrilège ! Ce sera l’agora principale, à laquelle on accèdera par une série d’escaliers, plusieurs petits escalators et un très grand, permettant d’accéder directement, prétend-on (j’en doute), à la station de R.E.R. depuis le jardin. Alors qu’actuellement, pour arriver à ce niveau, c’est un véritable parcours du combattant, où les visiteurs étrangers à la ville se perdent à coup sûr.
Tout cela est recouvert par la Canopée, à présent terminée, une sorte de toit de métal jaune et de vitres translucides, construction audacieuse dont on m’a assuré qu’elle a été orientée en tenant compte du sens où le vent souffle généralement, de sorte que, sauf en cas de tempête comme en 1999, on ne sera pas emporté par un ouragan traversant sans le moindre obstacle le lieu entier, qui ressemble beaucoup à ces souffleries où l’on teste les Airbus. Je me suis pourtant demandé, puisque ce toit est à claire-voie, s’il n’allait pas canaliser l’eau tombée du ciel les jours de pluie afin de mieux doucher les Parisiens – lesquels en ont parfois bien besoin –, mais on m’a juré que des gouttières, invisibles depuis le sol, détourneraient tout cela. C’est de toute façon beaucoup plus esthétique que les horreurs de béton qui caractérisaient le Forum avant la démolition. Seul problème qui préoccupe les autorités : les pigeons. Il semble qu’un penseur a été affecté à cette seule tâche, réfléchir à une solution, et qu’on envisage sérieusement, pour la dépigeonnisation, d’utiliser... des faucons. Je vous jure que je ne mens pas. (Non, ne comptez pas sur moi pour faire le malveillant jeu de mots que vous espériez)
À propos d’horreurs en béton, je ne m’habitue pas au nouveau jardin, qui est une insulte à l’architecture de l’église Saint-Eustache et de la Bourse du Commerce (au fait, vous saviez qu’on y avait tourné un western en 1974 ? J’ai le DVD). Avant que l’architecte fou rase la totalité du jardin, il y avait là une très jolie place semi-circulaire, avec des arbres, des bancs, et agrémentée par une allée bordée de fontaines qui conduisait à la rue des Prouvaires. Mais il ne reste rien que des banquettes en ciment, des plaques de gazon importé tout fait, et une demi-douzaine d’arbres squelettiques, lesquels atteindront sans doute leur taille (et leur capacité à fournir de l’ombre) dès que Hollande et ses sbires, ou leurs successeurs, auront vaincu le chômage, ce qui ne saurait tarder, tant leurs capacités à gouverner sont évidentes. En attendant, lorsqu’on voudra lire au calme, on pourra toujours se réfugier à l’intérieur de l’église, où je vais régulièrement lire « Le Canard enchaîné » que je viens d’acheter au kiosque voisin. Ce type d’édifice ne peut servir à rien d’autre, comme on sait.
J’y retourne demain pour prendre quelques photos.