Benettonsure

Publié le par Yves-André Samère

Benetton est une marque italienne de vêtements, plutôt en perte de vitesse, et qui naguère s’est rendue célèbre en faisant des campagnes de publicité fondées sur des affiches provocantes. Certaines de ces photographies étaient de très mauvais goût (des agonisants, des malades du sida), d’autres plus marrantes (un curé embrassant une religieuse sur la bouche). Notez que je n’écris pas qu’elles étaient « choquantes », parce que, je le dis depuis des années, les gens qui se prétendent choqués pour un mot ou une idée sont de foutus hypocrites, et je n’ai rien à faire avec cette clique, où grenouillent nombre de politiques.

Bref, Benetton vient de lancer une nouvelle campagne d’affichage, intitulée Unhate. Il y avait six affiches, toutes représentant des célébrités en train de s’embrasser sur la bouche, et toutes anodines. Il y avait ainsi le seul couple hétérosexuel, Angela Merkel et Sarkozy (c’est assez drôle, les deux zigotos ne pouvant pas se piffer dans le privé) ; le pape Benoît XVI et Ahmed El-Tayeb, imam de la mosquée du Caire ; Obama et Hu Jintao, président chinois ; les deux frères ennemis Nétanyahou, l’Israélien, et Mahmoud Abbas, le Palestinien ; les présidents des deux Corée(s), Kim Jong-il et Lee Myung-bak ; et encore Obama, décidément volage, avec Hugo Chavez, le cinglé qui préside le Vénézuela.

Pour une fois, Sarkozy a fait preuve de bon sens, il n’a pas hurlé, il s’est contenté de demander qu’on mentionne que la photo était un montage – sans doute pour qu’on n’aille pas croire qu’il avait une liaison avec Angela, ce qui ne serait venu à l’esprit de personne, que Sa Majesté se rassure ! Et, selon la tradition, le plus crétin de la bande, c’est encore et toujours le pape.

En effet, le Vatican a réagi aussi bêtement que d’habitude, et a hurlé, comme avait hurlé le pauvre Paul VI lorsque, jadis, l’écrivain Roger Peyrefitte avait mentionné, en première page d’un de ses romans (Tableaux de chasse), que le pape était homosexuel et n’avait choisi son nom de scène qu’en hommage à un jeune acteur dont il avait été amoureux. Cette réaction pontificale, faite dans un discours public, était stupide, car il avait fait à ce livre médiocre une formidable publicité, tout le monde s’était précipité dessus, et la Terre entière s’était marrée méchamment. Certes, Benetton a aussitôt retiré l’affiche litigieuse, mais comme elle est à présent sur Internet où on la déniche en deux secondes, et que le marchand de fringues le savait d’avance, c’est comme si le pape avait soufflé dans un violon – oui, moi, je dis « souffler », je suis pudique.

C’est pourquoi, au cas (très improbable) où j’aurais des ennemis cachés, je les avertis : racontez sur moi tout ce que vous voudrez, je m’en balance. Comme disait le narrateur de Printemps au parking, excellent roman de Christiane Rochefort, « Vous pouvez me bêcher, allez-y, le champ est libre ! »

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