Déboulonnons : Giscard (1)

Publié le par Yves-André Samère

Comme président de la République, François Hollande est si indécis que beaucoup de Français regardent à présent vers le passé, et regrettent ce dont ils ont un souvenir très vague. On a su, ainsi, que beaucoup avaient la nostalgie de Giscard, qui fut président de 1974 à 1981. Mais, comme disait Pétain, « les Français ont la mémoire courte » : Giscard n’était pas si bon que ça, et, persuadé qu’il descendait illégitimement de Louis XV (c’est vrai !), il avait adopté des manières rien moins que républicaines. Je ne vais pas brosser un tableau complet, cependant voici deux exemples tout à fait caractéristiques et... scandaleux.

Il y eut l’affaire Claustre-Depardon, et l’affaire Roger Delpey. Commençons par celle-ci, bien qu’elle soit postérieure. Je vous parlerai de l’autre affaire dans une prochaine notule.

Roger Delpey était un journaliste-écrivain, qui avait été correspondant de guerre en Indochine au temps de la guerre, et il était aussi un ami personnel de Jean-Bedel Bokassa, ancien officier français, démobilisé avec le grade de capitaine (on avait prétendu qu’il n’était que sergent, mais c’était de l’intox), qui était devenu président puis « empereur » de Centrafrique, et avait fait à Giscard, au temps où celui-ci était ministre des Finances, quelques cadeaux qui ont suffisamment défrayé la chronique pour que celui-ci ne soit pas réélu en 1981 (l’affaire des diamants). Or on soupçonnait Delpey d’avoir fourni au « Canard enchaîné » – c’était probablement faux – tous les renseignements qui avaient permis au Volatile de faire éclater ladite affaire en 1979. Giscard avait donc Delpey dans le collimateur, et le faisait surveiller. Or, en 1980, un an avant l’élection présidentielle, on vit Delpey sortir de l’ambassade de Libye à Paris. Il fut arrêté, accusé d’espionnage au profit de ce pays, et resta en prison sept mois, sans que jamais l’accusation ait pu être justifiée. Ultérieurement, Delpey publia deux livres, La manipulation (1981), sur les relations entre Bokassa et Giscard, qui s’était arrangé pour que son ex-ami soit accusé d’avoir fait tuer des étudiants en 1979, et d’être... cannibale (aucune preuve non plus, c’était une invention des services secrets français), puis, l’année suivante, Prisonnier de Giscard. En faisant incarcérer un ennemi personnel, Giscard avait donc rétabli l’honorable procédé de la lettre de cachet.

On est à peu près certain que cette affaire des étudiants massacrés a été amplifiée par Giscard en personne, après leur brouille restée célèbre (Giscard, notamment, avait couché avec Catherine, la femme préférée de Bokassa). Il y avait eu en effet des bruits de brutalité policière, et Bokassa avait accepté qu’une commission d’enquêteurs exclusivement africains se rende sur place, en Centrafrique, pour établir la vérité, puisqu’on prétendait que lui-même avait tué des étudiants de sa main. Or, après enquête, les enquêteurs rédigèrent un rapport qui l’innocentait complètement. Mais, bizarrement, cette commission d’enquête fit un séjour à Paris avant de publier ledit rapport, fut reçue par Giscard, et... modifia ses conclusions après cette entrevue ! Bokassa y devenait ainsi un assassin « d’enfants » (sic), ce qui est encore plus mal vu en Afrique que partout ailleurs. Il fut renversé en septembre 1979, juste avant qu’éclate l’affaire des diamants, et, bien plus tard, reconnu non coupable. Mais Giscard, entre-temps, avait perdu le pouvoir en France, et Mitterrand trônait à sa place.

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