Je n’aime pas « Les misérables »
Au risque de paraître iconoclaste, je dirai que je n’aime pas beaucoup Les misérables, de Victor Hugo. J’en parle, parce qu’une nouvelle adaptation britannique au cinéma va sortir le 13 février, et que je l’ai vue en privé il y a huit jours (trop longue, et truffée de trucages numériques superflus). Soit dit en passant, je me suis aussi tapé deux autres films qui sortiront bientôt, Hitchcock et Lincoln, et ce fut une épreuve, le premier étant une sorte de téléfilm bourré de sottises, et le second, une longue et bavarde autocongratulation états-unienne patriotique, à usage exclusivement interne. Ce sera bien la première fois que je déconseillerai un film de Spielberg.
Les misérables a été adapté (« a », pas « ont », et « adapté », pas « adaptés », je parle DU livre, ne m’embêtez pas) à dix reprises au cinéma et à la télévision. C’est celle de Jean-Paul Le Chanois, avec Jean Gabin, qui a été la meilleure adaptation. Mais Depardieu, en 2000, fut l’interprète le plus plausible : c’était dans un téléfilm en quatre épisodes diffusé en 2000. À vrai dire, la réalisatrice, Josée Dayan, avait eu l’idée curieuse de confier le rôle de Javert à John Malkovich et celui du procureur à... Karl Zéro (je me souviens très bien du jour du tournage, un vendredi, puisque Karl était arrivé très en retard à l’enregistrement de son émission sur Canal Plus). Tout le monde l’a oubliée – l’adaptation, pas Josée Dayan.
Pourquoi je n’apprécie guère l’histoire imaginée par Hugo ? Parce qu’elle ne tient pas la route. Intéressé surtout par le thème de la révolution du peuple, il avait fait de ses personnages de purs symboles, sans trop se soucier de la vraisemblance. Or, voyez : tout commence en 1809, quand Jean Valjean est au bagne pour avoir volé une miche de pain. À cause de ses tentatives d’évasion, on joue les prolongations, mais il sort enfin. À partir de cet instant, un policier obstiné, Javert, va s’attacher à ses pas pour tenter de le renvoyer au bagne, et cela va durer jusqu’en... 1832 ! Ah, c’est certain, un policier – inspiré de Vidocq – n’a rien d’autre à faire que de pourchasser un unique suspect dans tout le pays pendant vingt-trois ans. Pour comble, quand il s’aperçoit que sa proie est en fait un bienfaiteur de l’humanité, il se suicide. Ben voyons, on voit ça tous les jours, dans la police.
Qu’est-ce qu’il avait fumé, Totor ?