Le conclave en prison ?
Ils sont ridicules, ces clichés, et n’ont même pas le mérite d’être vrais. À chaque élection d’un pape, on nous ressort ces sottises des cardinaux « coupés du monde », ou « enfermés à clé dans la Chapelle Sixtine », ou encore, horreur, « privés de téléphone mobile ».
Comment peut-on croire que ces cent quinze vieillards vont rester enfermés toute la semaine dans une chapelle trop petite et qui n’offre aucune possibilité de séjour : pas de chambres, pas de salle à manger, pas de toilettes, pas de salles de bains, rien ? Et pour quelle raison les y cloîtrer ? Dans la Chapelle Sixtine, beaucoup trop exigüe, ils ne restent que pour palabrer, se livrer aux habituels marchandages dignes d’un souk de Marrakech, et naturellement voter – une seule fois aujourd’hui, deux fois par jour ensuite. Mais le reste du temps, et notamment la nuit, ils sont logés ailleurs, à deux cent cinquante mètres de là, de l’autre côté de la Basilique Saint-Pierre, dans une sorte d’hôtellerie, la résidence Sainte-Marthe, tout au sud du Vatican et tout près du mur d’enceinte : on la voit parfaitement de la rue (via della Stazione Vaticana, si ça vous intéresse). Elle se trouve à soixante mètres de la Basilique, c'est un double bâtiment de cinq étages chacun, comportant quatorze chambres à deux fenêtres par étage – donc 140 chambres, pas vraiment des cellules de moine. Et là, quel contrôle sur les téléphones voulez-vous exercer ? Chacun est seul dans sa chambre – enfin, on le suppose à défaut de l’espérer. Il n’y a tout de même pas de FBI au Vatican !
Toutes ces stupidités qu’ainsi ressassent journaux et radio-télés ne relèvent donc que de la pieuse légende journalistique, donc caricaturale.