Match : Poutine contre Elisabeth II
Poutine, tout le monde le sait, avait fait flanquer en prison un de ses opposants politiques, plus, en prime, deux filles qui avaient eu le culot de chanter, dans une église, une chanson qui ne flattait pas comme il le mérite ce grand démocrate. Mais il vient d’avoir l’idée d’amnistier tous ces prisonniers. Or... personne ne lui en sait gré, on crie au coup de com’, et il demeure aussi détesté qu’auparavant.
Lilibeth, elle, vient de faire un coup fumant : elle a gracié Alan Turing, ce génie de l’informatique sans qui les ordinateurs n’existeraient pas, et auquel on doit d’avoir pu casser le code Enigma utilisé par les nazis pour envoyer leurs messages de guerre. On pense que, sans lui, le Débarquement n’aurait pas pu avoir lieu le 6 juin 1944, ou aurait tourné au désastre. Oui mais voilà, le pauvre Alan était en même temps un immense savant et un grand criminel : ce salopard préférait les garçons. En foi de quoi, la justice de son pays lui a collé une condamnation bien méritée, laquelle, ultérieurement, a entraîné son suicide deux ans après sa condamnation, donc en 1954. Or la reine d’Angleterre a jugé bon de le gracier. De le GRACIER !
Je suis sans doute idiot et inculte, mais je croyais qu’on ne graciait que les coupables, pour telle ou telle raison humanitaire ; comme Omar Raddad, gracié par Chirac bien que non rejugé. Mais pas les innocents condamnés à tort (car enfin, Turing n’avait strictement rien fait de mal, n’avait causé de tort à personne, et avait rendu un immense service aux Alliés contre les nazis). Dans un cas pareil, et en cas d’erreur judiciaire, je pensais qu’on RÉHABILITAIT ceux auxquels la justice avait fait du tort.
Elle ne sait pas ça, Elisabeth II ? Ma vieille, avec toute ma modération habituelle, je te trouve pire que Poutine, et je te le dis : ou bien tu es aussi futée qu’une quelconque bimbo de la télé-réalité, ou bien tu es à peu près aussi sympathique que Virginie Triangulaire et Marjolène Impérial réunies. Parce qu’avec ta grâce hypocrite, Turing, il reste une sorte de coupable auquel son honneur n’a pas été rendu. Et ce n’est pas à Manchester qu’on aurait dû lui élever une statue, mais au centre de Londres, en plein Trafalgar Square.