Olivia De Havilland, actrice
Tout le monde la connaît, y compris ceux à qui son nom ne dit pas grand-chose : il ne doit pas exister au monde un seul individu qui n’ait pas vu Autant en emporte le vent, le film le plus célèbre de l’histoire du cinéma, et, en prime, Les aventures de Robin des Bois, où elle jouait Marianne – elle était tombée amoureuse, sans qu’il le sache, de son partenaire Errol Flynn trois ans plus tôt, lors du tournage de Captain Blood. Or, si je lui consacre mon premier article sur les acteurs, c’est parce qu’il y a urgence : je tenais à le faire de son vivant, or elle aura quatre-vingt-dix-neuf ans le 1er juillet prochain. Eh oui, de Gone with the wind, elle est la seule survivante, si l’on excepte Mickey Kuhn, qui jouait Beau Wilkes, et qui vit toujours. Même le plus jeune de la distribution, Billy Cook (le jeune garçon qui pleurait à la cérémonie de la gare d’Atlanta, lors du retour des soldats tués), est mort en juin 1981 – et il était de treize ans plus jeune...
Olivia interprétait Melanie, le personnage le plus gentil du film, rivale involontaire et belle-sœur de Scarlett O’Hara, puisque Ashley Wilkes l’avait préférée à la pétulante Scarlett, rôle qui lui valut un Oscar de la meilleur actrice... de second rôle. À la sortie du film, le 15 décembre 1939 à Atlanta, elle avait vingt-quatre ans. Comme sa jeune sœur dont je reparlerai puisqu’elle fut aussi une vedette de cinéma, et qui avait pris le pseudonyme de Joan Fontaine, d’après le nom de leur mère – elles se sont toujours détestées, et, à neuf ans, elle déclara injustement qu’elle léguait sa beauté à sa sœur Joan, parce que celle-ci n’en avait aucune –, elle était née à Tôkyô, où son père, d’origine britannique, était conseiller en brevets. Et justement, De Havilland, ce nom ne vous dit rien ? Si ! Son cousin Geoffrey fut un pionnier de l’aviation britannique, et fonda en 1920 la De Havilland Aircraft Company. J’ai voyagé plusieurs fois dans l’un des biplans de cette compagnie, un Dragon à six places (photo ICI, la troisième en partant du haut de la page ; on doit en trouver dans les aéro-clubs).
En 1965, elle a été la première femme à présider le jury du festival de Cannes, a joué dans 59 films à partir de l’âge de vingt ans, et Autant en emporte le vent était son dix-huitième. Très demandée, elle en a fait jusqu’à cinq par an, mais à partir de 1981, elle n’est plus apparue que dans des téléfilms, dont une fois dans La croisière s’amuse, ce qui ajoute peu à sa gloire... Mais, dit-elle, la vie d’actrice ne lui manque pas du tout. Depuis son mariage avec un Français, elle vit à Paris, 3 rue Bénouville – la rue où habite Giscard –, et elle est dans l’annuaire (cherchez...). Elle occupe ses loisirs en faisant le catéchisme aux enfants britanniques, a publié en 1962 un livre où elle racontait ses tentatives de s’adapter à la vie française, et Sarkozy lui a remis la Légion d’Honneur en 2010. Elle estime que les Français sont « très indépendants, intelligents, bien élevés et créatifs » (à mon avis, elle ne sort pas beaucoup du seizième arrondissement).
Sa mère, Lilian Fontaine, était déjà actrice. Olivia s’est mariée deux fois et a divorcé deux fois. De son premier mari, l’écrivain Marcus Goodrich, elle avait eu un fils, Benjamin Briggs Goodrich (1949-1991), qui devint analyste en statistiques et mourut chez elle de la maladie de Hodgkin. Elle divorça en 1954 et se remaria en 1955 avec le journaliste français Pierre Galante, qui travaillait à « Paris-Match », et avec qui elle restera vingt-quatre ans. De cette union naîtra Gisèle, née en 1956, qui se consacre au journalisme. Toutes deux sont visibles LÀ. Elle divorça en 1979. Galante est mort d’un cancer en 1998, et elle s’est occupée de lui jusqu’à sa fin.
Olivia ne manquait pas de courage personnel, puisqu’elle intenta un procès à la Warner Bros., qui, par un artifice juridique, maintenait les acteurs en sujétion perpétuelle. Elle gagna son procès, ce qui lui valut un respect général de la part de ses collègues acteurs. Impossible de citer tous ses films.
À Mexico, une rue porte son nom. À Paris, cela viendra sans doute, mais le plus tard possible, comme on dit.