Le premier mot de passe

Publié le par Yves-André Samère

Oublions un instant les sottises relevant du sport, et intéressons-nous un peu à l’intellect en ce qu’il permet de s’amuser sainement. Supposons que vous soyez candidat au jeu de France 3, Questions pour un champion. Supposons aussi que Julien Lepers...

(Je sais, vous allez me dire que Julien Lepers n’anime plus Questions pour un champion. Mais, d’une part, je ne parviens jamais à me souvenir du nom de son pâle remplaçant ; et, d’autre part, Julien Lepers est immortel, sa place est au Panthéon, et j’espère l’y voir entrer un jour, car je serai au premier rang de ses admirateurs. Fin de la parenthèse culturelle)

Donc, supposons que Julien Lepers vous pose l’une de ces trois questions :

- qui a inventé le mot de passe ?

- où a-t-on inventé le mot de passe ?

- quand a-t-on inventé le mot de passe ?

Il s’agit, en effet, de trancher dans le vif, et de répondre une bonne fois pour toutes à ces avertissements que vous lisez vingt fois par jour sur l’écran de votre ordinateur, et destinés à vous avertir que si le mot de passe de votre courrier est trop faible, la Terre va s’entrouvrir sous vos pieds, de sorte que vous serez englouti. Et l’on vous donne un tas de conseils, du genre : mélangez majuscules et minuscules, voyelles et consonnes,  ajoutez quelques chiffres et quelques caractères bizarres (ponctuation, lettres venant d’un langage différent du vôtre, etc.), et surtout, que votre mot de passe soit long. Donc, prohibez 123456 ou Kevin, le prénom de votre petit dernier.

Or il existe un mot de passe qui n’a servi qu’une fois, que tout le monde a déjà vu, et que personne n’emploie, allez donc savoir pourquoi. Ce mot, c’est celui que vous lirez ci-dessous en sélectionnant à la souris l’espace apparemment vide que je ménage entre deux paragraphes. Voici :

 

Sésame, ouvre-toi !

 

Ce mot de passe est long, 19 caractères, il comporte une majuscule, un caractère accentué, trois signes de ponctuation et une espace, donc il est quasiment parfait. Reste à trouver qui l’a inventé, ce qui nous permettra d’approcher de la vérité en ce qui concerne la date et le lieu de son invention.

Comme vous avez reconnu l’expression qui a permis à un certain Ali Baba d’ouvrir la caverne des Quarante Voleurs, vous avez à présent le nom de l’auteur : Antoine Galland. Oui, rien à voir avec l’un des auteurs anonymes du recueil des Mille et une nuits, car cette histoire magique n’a jamais fait partie de ce recueil, elle a été rajoutée, avec celle de Sinbad le marin et quelques autres. Et puisque Galland a écrit ses œuvres à Paris, à partir de 1704 et jusqu’en 1717, vous avez presque la bonne réponse !

Si vous aviez proposé quelque nom à consonance anglaise de quelque quidam ayant œuvré dans la Silicon Valley entre 1980 et maintenant, vous n’emporterez pas la Cadillac en or massif qui est le cadeau traditionnel de ce présent bloc-notes. Fallait réfléchir un peu !

Écrire ci-dessous une ânerie quelconque :

D
Voilà ce que c'est que d'avoir des lecteurs qui regardent "questions pour un champion" et lisent aussi Antoine Galland (nobody is perfect)... j'avais deviné !<br /> Ses contes sont charmants, bien dans l'esprit du XVIIIème siècle.
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Y
Galland était très conformiste. L’un des contes du recueil d’origine contenait une scène érotique qu’il n’a pas voulu traduire.Voir sa fiche sur Wikipédia, pour une fois. Quant à son style, il était tout à fait dans l’air du temps, et très éloigné de celui des contes originaux.
D
Je pense qu'il faisait comme La Fontaine : prendre un thème et l'adapter à son temps. La fidélité à l'auteur n'était pas forcément dans la mentalité de l'époque. Je vais me pencher sur la traduction dont vous parlez, ça m'intéresse.
Y
Je ne l’ai lu qu’avec « Les mille et une nuits » (première lecture). Ensuite, j’ai changé de traducteur, avec Mardrus. Car Galland était un peu coincé, il faut l’avouer !