De Gaulle en Commandeur ?
Vu, à la devanture d’un kiosque, la page de couverture d’un hebdomadaire que je ne lis pas, et qui annonce « La fin de l’amnésie pour le 17 octobre 1961 ». Ben oui, dans cinq jours, ce sera le cinquantenaire, ce journal n’allait pas rater l’occasion. La commémo, c’est vendeur, ça, coco.
Le 17 octobre 1961, pour ceux qui ont séché le dernier cours afin d’aller faire un flipper, c’est le jour de la manifestation des Algériens de Paris pilotés par le FLN, durement réprimée, dont la Seine charria ensuite des dizaines de corps. Allez voir sur Wikipedia, je ne peux pas tout faire.
Ce dont je suis quasi certain, c’est que, comme d’habitude, on mettra tout sur le dos de Maurice Papon, qui était l’époque préfet de police, et peut-être aussi, un peu, sur celui de Roger Frey, alors ministre de l’Intérieur. Comme d’habitude aussi, pas une voix ne s’élèvera pour rappeler que le premier responsable de tout cela porte le nom de Charles De Gaulle, qui, après tout, en sa qualité de président de la République du moment, DOIT porter la responsabilité des exactions qui se commettaient en son nom – et celle-là ne fut pas la seule.
Mais c’est ainsi, De Gaulle a été pour ainsi dire déifié de son vivant, et sa statue, plus solide que celle du Commandeur, semble indéboulonnable. Nous allons le traîner pendant des siècles encore, ne vous faites pas d’illusion. Certes, les jeunes ne savent absolument pas qui c’était et le confondent avec un aéroport, mais les vieux se chargent de conserver la flamme. Même ses anciens adversaires : de Giscard à Mitterrand, ils se sont tous appliqués à se référer au grand Général, et quand un président de la République se révèle trop minable, on écrit automatiquement que « les habits du Général De Gaulle sont trop grands pour lui ».