Des affaires en rafale

Parlez-moi d’un « marché du siècle », parce qu’on a (peut-être, rien n’est signé) réussi à vendre des avions à l’Inde ! D’abord, si les princes qui nous gouvernent clament bien haut qu’ils en ont vendu 126, la vérité est qu’on en a fourgué... dix-huit aux porteurs de turban, et pas un de plus. Les cent huit autres seront construits par les Indiens eux-mêmes, et chez eux.

Oui, bien, bon, me direz-vous, mais comment vont-ils faire, ces charmeurs de serpents ? Ils vont faire appel à leurs fakirs, pour connaître le mode de construction de nos zincs ? Ou appeler leurs anciens colonisateurs, les Anglais ?

Ben non, pas la peine, puisque, en prime de ce fabuleux achat des dix-huit tombeaux volants, on leur refile les secrets de construction qui vont avec, et qu’en temps ordinaire on protège avec un tel acharnement, que toute une section de nos services secrets s’affaire pour nous garantir contre l’espionnage industriel. Cette mirifique affaire, qui ressemble au geste de Gribouille plongeant dans la rivière pour échapper à la pluie, s’appelle, vous le savez puisque je vous en ai déjà parlé, un « transfert de technologie » (avec la belle faute de français consistant à confondre technique et technologie).

On a vraiment les meilleurs hommes d’affaires de la planète : les Africains, qui sont des salopards, disent en s’esclaffant que les Français sont encore moins bons pour le commerce que les Italiens ! Et je vous ferai remarquer que, dans beaucoup de pays d’Afrique, par exemple le Maroc, les commerces les plus florissants sont tenus par des Indiens (allez vous balader dans le centre-ville de Casablanca, vous verrez comme ils sont dévoués, ces mâcheurs de bétel). Bref, une fois que les Indiens auront reçu la « technologie » made in France, vous devinez ce qu’ils vont faire : construire les mêmes avions, mais pour beaucoup moins cher (vu le prix de la main-d’œuvre en Asie), et on n’en vendra plus un seul, de Rafale. Vous me direz que ça ne nous changera pas beaucoup.