Laïcité allemande

Publié le par Yves-André Samère

Il faut avouer que l’Allemagne moderne est une drôle de république ! On sait que, dans ce pays, on doit DÉCLARER à l’État dans quelle religion on a été baptisé. Et il est prélevé sur vos impôts une quote-part qui est reversée à ladite religion. Si vous avez été baptisé et que cet impôt vous défrise, il vous faut abjurer – ce qui sonne très bien et vous donne l’impression de descendre de Jeanne d’Arc !

Mais ce n’est pas tout. Figurez-vous que, dans certains Länder (les régions allemandes), est en vigueur une certaine interdiction, justement baptisée Tanzverbot, qui, ainsi que l’indique son étymologie, est une interdiction de danser qui s’applique certains jours de l’année. Ainsi, la loi fondamentale précise, dans son article 140, que « le dimanche et les jours fériés sont reconnus par l’État comme jours de chômage et d’élévation spirituelle », et que les citoyens sont « invités » à rester au calme ces jours-là. Rester au calme... On adore.

En Bavière, par exemple, l’article 3, paragraphe 2, précise que « les manifestations publiques à caractère festifs ou distractifs les jours de repos (stille Tage) ne sont autorisés que dans la mesure où [elles] n’entravent pas leur caractère sérieux ». Ces fameux jours de repos sont : la Toussaint, le Buss und Bettag (dernier mercredi avant l’avent, en décembre), le Totensonntag (dimanche des morts), la Heiligabend (nuit « sainte » du 24 décembre), le Aschermittwoch (le mercredi des cendres, où commence le jeûne de 40 jours avant Pâques), le Gründonnerstag (jeudi « saint »), suivi du Karfreitag et du Karsamstag. Rien de prévu pour Pâques, bizarre, même si d’autres Länder interdisent en effet la danse pour Pâques, l’Ascension et la Pentecôte.

Si Berlin et Hambourg sont un peu moins lugubres, c’est bien sûr dans les régions les plus conservatrices, Bavière et Bade-Wurtemberg, que ces sottises sont le plus respectées. Là, on annule certains concerts et manifestations sportives, et on ferme les discothèques, où Satan exerce son influence bien connue. Pour les établissements autorisés à rester ouverts, ils doivent baisser leurs tarifs (ce qui les incite naturellement à ouvrir), et diffuser de la musique plus calme. Aux clients têtus, on rappelle que c’est la loi, et un Allemand qui ne respecte pas la loi, on n’a jamais vu ça. D’autant moins que les tribunaux ne rigolent pas non plus avec cette règle, et rejettent les recours des opposants. Outre que le parti d’Angela Merkel, la CDU, soutient l’interdiction de danser.

Ajoutons que, vu l’article 7 de la loi fondamentale, l’enseignement de la religion est obligatoire dans les écoles publiques – même si les enfants ne sont pas obligés d’assister aux cours !

Cela dit, en Angleterre et en Irlande, c’est à peu près pareil. Qu’est-ce que nous sommes heureux, nous autres Français ! Dire qu’on se plaint de tout...

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