Les médias contre la vérité

Publié le par Yves-André Samère

Le solide mépris dans lequel on n’a pas tort de tenir les médias vient en partie de ce que, par simple paresse d’esprit, et par obsession de trouver la formule qui frappe aux dépens de l’expression exacte de la vérité, ces messieurs se contentent le plus souvent de citations tronquées, dans lesquelles on peut lire tout ce qu’on veut – tout, sauf la réalité.

J’ai déjà donné l’exemple de cette accusation absurde dont Jack Lang a été victime à l’occasion de l’arrestation puis de la libération de Strauss-Kahn. Lang avait dit que cette libération était normale dans le système judiciaire des États-Unis dès lors que le délit n’avait pas entraîné la mort d’un homme, et un journaliste idiot avait interprété la chose à sa manière, en feignant de croire que « pas mort d’homme » signifiait que la tentative de viol sur une femme de chambre était un évènement bénin sur lequel on pouvait passer l’éponge. Quoi qu’on pense de lui, Lang, ce vieux briscard, n’était pas assez idiot pour se laisser aller à proférer en public une telle ânerie.

Bien avant cela, les journaux (et les syndicats, soyons justes) avaient eu la peau de Claude Allègre : tous avaient bondi sur son expression « dégraisser le mammouth », et feint de comprendre que le ministre entendait sabrer dans les effectifs des personnels enseignants de l’Éducation nationale, alors qu’il n’avait pour intention que d’alléger le poids de l’administration de ce ministère.

Et puis, il y a eu cette pseudo-déclaration d’Eva Joly à propos du même DSK : « Oui, je le connais bien, je l’ai mis en examen », avait-elle dit – selon les journaux –, ce qui avait amené Martine Aubry à faire ce commentaire : « Honteux ! ». Or, dans son dernier livre, Sanguines – Croquis politiques, Philippe Meyer rappelle le propos complet de l’ancienne juge, qui n’avait pas du tout dit cela ! Les paroles exactes et intégrales d’Eva Joly étaient « Je l’ai mis en examen et j’ai fait un non-lieu très rapidement ». Propos d’ailleurs rapportés avec exactitude par « Libération » à l’époque où ils avaient été tenus, et qui, en somme, démontraient que, loin d’être une fanatique de l’inculpation des politiques, madame Joly avait fait son travail de manière consciencieuse et honnête – pas du tout ce qu’on voit dans le film que Claude Chabrol avait réalisé quand il la prit comme modèle de son personnage incarné par Isabelle Huppert.

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