Préférez VOTRE langue !
Il ne faut pas sous-estimer l’importance de la langue dans la formation de la pensée. Lisez un texte en anglais et son équivalent en français, et vous constaterez que l’esprit n’est pas le même. Par conséquent, croire qu’on peut dire EXACTEMENT la même chose dans deux langues différentes est une illlusion, et se soumettre docilement à la dictature de l’anglais, comme on le fait dans un grand nombre d’institutions européennes (et notamment françaises), sous le prétexte que sur la totalité de la planète « tout le monde le comprend », est une erreur. Ce n’est pas moi qui le dit, c’est Pierre Bourdieu, qui parlait de « s’exposer à être anglicisé dans ses structures mentales ».
Ses structures mentales, tout est là. Car la langue n’est pas un simple outil permettant de s’exprimer (« L’essentiel, c’est de se faire comprendre», disent les niais). Si l’esprit russe diffère de l’esprit français, si l’humour arabe n’a rien à voir avec l’humour anglais, si la rigidité allemande est à l’opposé de la vivacité italienne, tout cela est induit par la langue apprise au berceau. La langue avec laquelle vous avez découvert et nommé les éléments de l’univers possède ses règles – ses contraintes – qui façonnent votre pensée. Si vous ne voyez pas qu’une langue de remplacement comme l’anglais (quand l’anglais n’est pas VOTRE langue, évidemment) bride votre imagination et vos capacités naturelles d’innover, et qu’elle vous oblige à vous aligner sur des façons de penser qui ne sont pas les vôtres, vous ne voyez rien. Ainsi, ce n’est pas anodin que la grammaire française privilégie le verbe et l’adjectif, quand la grammaire anglaise donne la priorité au nom.
Bref, préférez votre langue, quelle qu’elle soit (je n’ai pas dit qu’il fallait ignorer les autres !).