Se payer une bonne tranche d’avocats

Publié le par Yves-André Samère

L’épidémie a commencé il y a très peu d’années : alors que le gouvernement et l’Assemblée nationale, qui autrefois comptaient beaucoup de professeurs, est aujourd’hui une pépinière d’avocats d’affaires, a vu des ministres débarqués du gouvernement, voire des Premiers ministres brouillés avec le Pouvoir, décider de devenir avocats. Rachida Dati, Dominique de Villepin... Cherchez, vous allez en trouver d’autres, et c’est plus amusant que les œufs de Pâques.

Manifestement, c’était un abus, qui recouvrait deux buts. D’une part, « faire de l’argent ». D’autre part, se mettre à l’abri des poursuites éventuelles. C’est fou ce que ça protège bien, un barreau !

Pas de surprise, quand il y a un abus qu’on ne peut pas empêcher, on fabrique vite un texte, pour... l’autoriser ! C’est Cocteau, dans Les mariés de la Tour Eiffel si ma mémoire n’est pas en trop mauvais état, qui avait sorti cette réplique ayant depuis beaucoup servi : « Ces mystères nous dépassent, feignons d’en être les organisateurs ». Et voilà comment un décret – un décret, pas une loi, c’est bien plus rapide – vient d’être pris par ce Pouvoir moribond et qui va bientôt passer l’arme à gauche (c’est le cas de le dire), permettant aux ministres, aux élus et jusqu’aux assistants parlementaires, de devenir avocats par un coup de baguette magique, c’est-à-dire sans passer le CAPA (Certificat d’Aptitude à la Profession d’Avocat). Il leur suffira de prouver qu’ils ont derrière eux « huit ans au moins d’exercice de responsabilités publiques les faisant directement participer à l’élaboration de la loi ».

Autrement dit, si vous avez été député ou assistant d’un député, même si vous n’avez rien fichu pendant huit ans, vous voilà avocat sans autre formalité ! Magnifique, votre carnet d’adresse va servir enfin à quelque chose.

Il y a quelque temps, « Le Canard » avait signalé ce passe-droit, mirifique et qui va concerner beaucoup de monde, notamment les députés qui vont être débarqués en juin. Il écrivait que « des parasites dotés d’un carnet d’adresses seraient rétribués pour que de vrais avocats, correctement formés, fassent le boulot à leur place » (ceux qu’ils engageront comme stagiaires dans leurs nouveaux cabinets, vous aviez compris).

Inutile de dire que les vrais avocats sont ravis. Surtout de voir avec quelle promptitude ce décret a été signé. Et on dit que la Justice est lente !

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