Vivent les Gérard !

Lorsque j’étais honnête, donc fauché, comme j’aimais déjà le cinéma, je me disais que, si un jour j’avais de l’argent, j’irais au Festival de Cannes. Aujourd’hui que je vis dans l’opulence (en attendant de mourir dans l’ambulance), le Festival de Cannes, je m’en fous. Royalement. C’est qu’entre-temps, j’ai appris ce qu’était le Festival de Cannes : pas un endroit où l’on aime les films, certainement pas, mais un marché où dominent le lucre et la frime. Songez que le plus grand réalisateur de tous les temps, Alfred Hitchcock (ce n’est pas moi qui le dis, c’est Orson Welles), est allé sept fois à Cannes, sans jamais y obtenir la moindre récompense ! Des festivals où l’on aime le cinéma, il en existe, à Venise, à Berlin, à Toronto, voire à San Sebastián. Non, ne me parlez pas de Sundance, qui est le festival du politiquement correct. Ne me parlez pas non plus des Césars, le rire est douloureux à mes lèvres gercées en ce printemps pourri où l’on regrette la canicule.

Bref, en matière de cinéma, je me contente des Gérard. Si vous ne connaissez pas les Gérard, je vous conseille de vous brancher sur Paris-Première le 10 mai prochain, à dix heures du soir. Si vous n’avez pas cette chaîne, ce n’est pas grave, elle a son site Internet. Hélas, ledit site n’a qu’une durée de vie limitée.

Les trois mal élevés qui décernent chaque année cette récompense pas du tout recherchée s’appellent Frédéric Royer, Stéphane Rose et Arnaud Demanche. Ils publient chaque année leur liste des « lauréables » (le mot vaut mieux que l’inepte « nominés », avouez !). Comme toujours, leur tête de Turc est la chère Arielle Dombasle, mais on n’a pas oublié que, voici quelques années, ils avaient décerné à Catherine Deneuve (choisie devant Jeanne Moreau, Annie Girardot, Marthe Keller et Fanny Ardant) le « Gérard de l’actrice que les journalistes s’obstinent à appeler “Mademoiselle” alors qu’elle a plutôt une tête à ce qu’on l’appelle “Mémé” ».

C’est ignoble. Ils ne seront jamais invités à Cannes, et ce sera bien fait.