« Ils s’en sont suivis » ? Non !
Entendu, au bulletin d’informations de treize heures sur France Inter, un journaliste commenter des évènements tragiques en Turquie, et qui a conclu que je ne sais plus quels autres incidents « s’en sont suivis ».
Excusons ce malheureux, dont la connaissance de sa langue maternelle le rend apte à décrocher la rubrique des chiens écrasés dans « Le petit écho de Sainte-Foy-la-Grande ». Expliquons calmement, car c’est un peu ardu.
Le verbe s’ensuivre s’écrit comme je viens de l’écrire, et pas « s’en suivre » avec une espace précédant le verbe suivre. C’est un verbe réfléchi, qui, tout comme le verbe pleuvoir, ne se conjugue qu’à la troisième personne du singulier ou du pluriel (certains même contestent qu’il ait un sens au pluriel). Vous ne dites pas « je pleus, tu pleus, nous pleuvons, vous pleuvez », mais vous pouvez dire il pleut ou les ennuis pleuvent.
Il possède deux sens : 1. venir après, comme dans « tout ce qui s’ensuit » ; 2. survenir comme effet, découler à titre de conséquence, comme dans « ce traité et la paix qui s’est ensuivie ». Vous remarquez le en qui suit le pronom S’, indice qu’il ne fait pas partie de ce verbe...
S’ensuivre, s’il est utilisé avec un sens affirmatif, implique l’indicatif pour le verbe suivant (« de ce raisonnement, il s’ensuit que j’AI raison »), mais le subjonctif s’il a été utilisé au sens négatif ou interrogatif (« il ne s’ensuit pas de là, s’ensuit-il de là que vous AYEZ tort ? »).
L’erreur la plus courante est de croire que « s’en suivre » (en trois mots dont le pronom) signifie « être la conséquence de », car le verbe se suivre utilisé ici, et qui ne peut pas être réfléchi puisqu’on ne peut pas se suivre soi-même, n’a pas ce sens – ce qui serait le cas pour suivre tout seul !
Donc le journaliste dont je parlais au début aurait dû dire « les évènements qui se sont ensuivis ». Le verbe se suivre n’a rien à faire ici.
Bien. Fin du cours. Fermez vos cahiers et sortez en rangs.
NB : j’espère que les milliers de lecteurs que certainement je compte à Sainte-Foy-la-Grande ne se formaliseront pas que j’ai cité leur cité. Je l’ai fait pour deux raisons. Tout d’abord, j’ai voulu éviter de faire encore de la publicité pour une certaine localité du Lot, que Daniel Prévost a suffisamment immortalisée. Ensuite, Sainte-Foy-la-Grande a déjà eu les honneurs d’une pièce, Adieu Berthe, écrite par Francis Blanche, qui adaptait un film des Marx Brothers, Room service (en français, Panique à l’hôtel), et j’ai voulu ranimer un peu la flamme. Je suis sûr qu’il y a des tas de bons journaux à Sainte-Foy-la-Grande.