Adopter les erreurs des autres

Publié le par Yves-André Samère

J’ai connu deux frères qui enseignait dans le Nord. L’un, Luc, était professeur de technologie au collège Jules-Ferry, à Haubourdin. L’autre, Marc, enseignait la mécanique automobile au collège René-Descartes, à Loos.

Marc dispensait donc un enseignement pratique à des garçons, et travaillait dans un des ateliers du collège (il y avait aussi un atelier de couture). Ses élèves apprenaient sur le tas la pratique de la mécanique : régler les divers organes d’un moteur, réparer ou ajuster telle ou telle pièce, etc. Ils assimilaient, en somme, les techniques de la mécanique. Il n’y avait que très peu de cours pris par écrit, la totalité ou presque du travail s’effectuait manuellement. Les mains dans le cambouis, comme on dit.

Les élèves de Luc, eux, travaillaient dans une salle de classe et ne voyaient jamais un moteur, ni quelque outil que ce soit, sinon sous forme de maquette. Leur professeur leur enseignait l’histoire des techniques, la législation concernant ce secteur d’activité, les progrès réalisés, et les cours étaient donnés via des schémas reproduits au tableau ou sur des documents photocopiés. En somme, ils assimilaient par l’étude les théories des diverses techniques, et comprenaient que c’est ça et seulement ça, la technologie.

Si vous leur aviez parlé DES « technologies nouvelles », ils auraient ouvert des yeux ronds et auraient demandé une explication : en quoi l’étude des techniques pourrait-elle être « nouvelle » ? Existe-t-il une biologie nouvelle, une archéologie nouvelle, une logique nouvelle, une géométrie nouvelle ?

Ils se seraient aussi demandé pourquoi tout le monde confond ces deux mots, technique et technologie, et abandonne le premier au profit exclusif du second. Et s’ils avaient l’esprit un tant soit peu ouvert sur le monde, ils auraient compris que les Français ne font que singer les États-Uniens, qui ne connaissent que technology, de même qu’ils s’obstinent à dire « decade » quand ils veulent désigner une décennie, ce qui est un contresens absolu.

Et si l’on cessait de reprendre à notre compte les erreurs des autres, au lieu d’adopter ce qu’ils ont de mieux ?

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