France 3 : « Le Rocher... »

Publié le par Yves-André Samère

Bien que n’éprouvant aucune sympathie pour Gérard Miller, j’ai tenu à regarder, hier soir sur France 3, le documentaire qu’il a réalisé à propos de la principauté de Monaco au vingtième siècle, Le Rocher était presque parfait – vous avez reconnu le démarquage du titre français d’un film d’Alfred Hitchcock. Au centre de la saga, bien entendu, Rainier III et Grace Kelly, puis leur trois enfants, toujours vivants (quand je pense que le petit-fils par alliance de la sublime Grace, c’est Gad Elmaleh, « comique pas drôle qu’on paye une fortune pour faire la pub d’une banque de merde », comme on a dit samedi sur Groland, j’en suis malade). Au centre de la démonstration, car c’en était une, cette lubie de la totalité des psychanalystes, expliquer tous les évènements de la vie d’un personnage par ses traumatismes hérités d’une enfance malheureuse. C’est curieux, seuls les gens célèbres ont une vie ravagée par une enfance malheureuse, les autres, pour la plupart, s’en sortent assez bien, ou font moins de tapage. Cela me rappelle une chanson de Pierre Vassiliu : « C’était un p’tit gars / Qui s’app’lait Armand / L’avait pas d’papa / L’avait pas d’maman ». Passons.

Quelques documents sans doute inédits m’ont intéressé, comme cette lettre manuscrite dans laquelle Grace Kelly annonçait à Hitchcock – “Dear Hitch” – que, sa famille et toute la principauté s’opposant à ce qu’elle fasse avec lui un quatrième film, elle devait lui exprimer ses regrets. À quoi Hitchcock répondit dans une lettre également manuscrite – “Dear Grace” – qu’il le regrettait tout autant. Il faut dire que le rôle prévu dans Marnie aurait fait d’elle une femme devenue voleuse et frigide pour avoir tué un homme alors que, fille d’une prostituée, elle avait cinq ans ! Résultat, Hitchcock fit le film avec Tippi Hedren, déjà vedette dans Les oiseaux, s’enticha d’elle, mais comme elle ne voulut rien savoir, il se désintéressa du film et le rata en beauté. Il faut dire que tous les films sur la psychanalyse sont notoirement ratés, y compris, sur ce point précis, les trois qu’il fit déraisonnablement.

Un détail rigolo : le père de Grace, un parvenu nommé John Kelly, était obsédé par les exploits sportifs, car son père avait été trois fois champion olympique. N’ayant pu devenir lui-même champion d’aviron, car ce sport aristocratique n’était pas ouvert aux gens nés dans le ruisseau, il s’acharna à faire de son fils, également prénommé John, un champion de cette discipline. John gagna une médaille de bronze aux Jeux Olympiques d’été de 1956, devint très populaire, puis... se mit en ménage avec un jeune transexuel. Ayez donc des enfants, pour les joies que ça procure.

Autre détail beaucoup plus sensationnel : en 1982, Grace tourna un autre film après ces évènements. Cela s’appela Rearranged, il durait trente-trois minutes, et n’est sorti ni au cinéma, ni à la télévision, ni en vidéo, car il était trop mauvais (on en a vu deux scènes et quelques photographies, par conséquent il existe bel et bien), et je parierais que vous n’en aviez jamais entendu parler. En tout cas, il figure dans la filmographie de Grace Kelly, et son mari, le prince Rainier, y apparaît aussi.

Mais, qui sait, il refera peut-être surface un de ces jours, tout comme le Fear and desire dont Kubrick, mécontent de son travail, croyait avoir détruit toutes les copies : il est passé sur la même France 3 ce mois-ci !

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