N’ayez pas de cœur !

Je ne sais qui a eu l’idée bizarroïde de faire du cœur le siège des sentiments. Un Espagnol, peut-être ? Ces gens-là mettent du corazón partout... Le cœur, rappelons-le aux innombrables cancres qui dormaient sur le radiateur pendant les cours de sciences naturelles, n’est jamais qu’un muscle, une vulgaire pompe, uniquement responsable de la circulation du sang dans les artères et les veines, et qui serait bien incapable de faire autre chose. Les sentiments, c’est le cerveau qui s’en charge, de même que des sensations envoyées par le système nerveux, et de tout ce qui se rapporte à la sensibilité, physique ou intellectuelle.

Coluche, qui n’était pas tout à fait un imbécile, le savait bien. Mais, pour se faire entendre des masses populaires, comme disait Georges Marchais, il eut la bonne idée de créer une organisation chargée de nourrir les affamés, qui commençaient à pulluler à son époque (il n’avait encore rien vu !), et la mauvaise idée de baptiser ça « les Restos du Cœur ». L’appellation est restée, elle a également beaucoup servi à une bande de charlatans, avides de publicité, pour se faire mousser en prétendant récolter des fonds destinés à financer ce service que l’État n’assurait pas, contrairement à ce qui devrait être sa mission. Mais le jour où vous dénicherez un homme politique qui crève de faim, prévenez-moi, je commencerai une collection, à défaut d’une collecte.

Je ne vais rien dire sur les Restos du Cœur, mais tout le monde n’apprécie pas. Ainsi, Pierre Desproges, qui n’aimait pas Coluche non plus, a consacré, à l’entreprise plutôt tapageuse qu’ils sont devenus très vite, une de ses Chroniques de la haine ordinaire, que vous pourrez écouter ICI, et qui s’intitule Les Restos du Foie. C’est très méchant, mais pas entièrement inopportun.